Ka (PlayStation 2, 2001)

KA
Titres alternatifs : Mister Mosquito / Mr Moskeeto
Année : 2001
Studio : Zoom
Éditeur : Sony
Genre : l’épicurien de rappel
Joué et testé sur PlayStation 2
Support : DVD-ROM


C’est l’été. Et au Japon, cela va de pair avec une humidité galopante… Dans la petite maison de la famille Yamada, on apprécie donc le confort cossu procuré par l’air conditionné. Hélas, ce calme estival sera bientôt mis à mal par un minuscule intrus, qui a peu de temps devant lui s’il souhaite procréer avant de rendre l’âme – il faut dire que la durée de vie d’un moustique est plutôt éphémère ! Mais l’insecte en question est d’un genre un peu particulier : il n’est jamais rassasié, et revient souvent l’assaut – il n’a peur de rien, pas même des insecticides et autres pièges fatals disséminés çà et là par la famille Yamada. D’ailleurs, pour se venger, il prendra un malin plaisir à les piquer là où c’est le plus désagréable. Là où ça fait mal ! Le père Yamada, son épouse qui manie maintenant le couteau comme un ninja en raison de son entrainement intensif de femme au foyer, mais aussi leur fille Rena adepte des arts martiaux (prenez garde à ses coups de pied !) vont organiser la résistance. Après plusieurs jours de piqûres intensives et infamantes, c’est en effet toute la famille qui va s’unir pour vaincre ce petit moustique insaisissable. C’est la guerre !

Ka, en japonais, signifie littéralement « moustique ». Et avant de sauter au plafond en vous disant que la langue japonaise est super facile à mémoriser et à apprendre, dites-vous bien que le mot en question est beaucoup plus aisé à prononcer, qu’à écrire (蚊). Argh. Bref, du coup et pour éviter tout jeu de mot vaseux, je vais utiliser le titre américain de KA, à savoir MISTER MOSQUITO – c’est croquignolet, en plus.

Dans MISTER MOSQUITO, vous incarnez donc un moustique. Oui, vous basculez chez l’ennemi, le vilain, l’adversaire de toute une vie ! Mais votre temps est compté : en effet vous ne survivrez pas à l’été. Il conviendra donc d’optimiser vos quelques semaines restantes pour perpétuer l’espèce. Votre dévolu s’est jeté sur une maison japonaise typique, habitée par une famille classique : le père travailleur, dégarni et un peu bougon, la mère en femme au foyer dévouée et matineuse mais beaucoup plus forte qu’en apparence et la lycéenne pimpante que l’on prendra grand plaisir à traquer jusque dans la salle de bains – oui, oui, MISTER MOSQUITO est un jeu qui tente beaucoup et qui ose (même les plans boobs !), correctement réalisé, assez maniable et pétri d’humour. Celui-ci est parfois gratuit (le moustique qui mate la jeune fille qui sort de son bain – hors champ pour le joueur, j’en suis le premier désolé), parfois référencé (la mère de famille qui cuisine en mode « bullet time »), et le plus souvent assez fin et tout entier basé sur la société japonaise, avec la mise en scène des Yamada, cette famille typique dont les programmeurs souligneront à la fois les quelques travers (stéréotypés) mais aussi les nombreux bons côtés. Oui, vous prendrez le temps de faire connaissance avec ces trois joyeux drilles (ainsi qu’avec l’une de leurs invités) grâce à des saynètes aux dialogues souvent bien sentis, introduisant chacun des niveaux.


Vous aussi, vous avez hâte d’être « à l’été » ?

Des niveaux qui peuvent paraître bien étroits au premier coup d’œil : une petite salle de bains, la cuisine, une chambre, etc. Oui mais non. C’est d’ailleurs là que l’on s’aperçoit de la qualité du travail fourni par l’équipe des développeurs : votre moustique étant particulièrement petit, son champ de vision ne lui permet pas de distinguer tous les détails alentour, et c’est parfois en vous rapprochant d’un endroit précis que vous vous rendrez compte qu’il y avait un secret dans un interstice minuscule. Un pli de rideau, la porte entrouverte d’un four à micro-ondes, un renfoncement au-dessus de la climatisation… Oui, il s’agit d’un tour de force, ou de farce c’est selon : MISTER MOSQUITO vous donne véritablement l’impression d’être ridiculement petit – une simple chambre d’adolescente devient un territoire entier à défricher, avec ses pièges, ses secrets, ses passages invisibles au premier coup d’œil et ses nombreux détails qui viennent renforcer le réalisme des lieux. Et donc l’immersion du joueur. Non, après avoir joué à MISTER MOSQUITO, vous ne verrez plus jamais votre chambre comme avant !

MISTER MOSQUITO n’est, par conséquent, aucunement un kusoge, ces « jeux de merde » comme ils sont parfois amoureusement surnommés au Japon – décalés, avec des idées bizarres mais au gameplay flétri. Non, MISTER MOSQUITO est un vrai jeu ! Outre ses maps géniales qui jouent vraiment avec la perception des distances et de la profondeur, MISTER MOSQUITO dispose d’un gameplay relativement bien huilé. Tout n’est pas parfait (le gameplay affiche ses limites durant les combats les plus difficiles), mais dans l’ensemble le moustique répond plutôt bien au pad, il est possible de voler dans toutes les directions, d’accélérer, d’esquiver des attaques (les séquences où l’on tente de nous écraser passent au ralenti) et bien évidemment de piquer pour sucer du sang. En l’occurrence, ne cherchez aucun réalisme là-dedans : pour renforcer le côté vidéoludique de la chose, les programmeurs nous imposent de piquer une ou plusieurs zones précises de la peau de la personne présente dans la pièce. Il s’agit parfois d’un simple prétexte humoristique pour déclencher de larges sourires sur le visage du joueur (piquer la poitrine de la jeune fille, s’acharner sur le père en le piquant aux endroits les plus désagréables…), mais le plus souvent ces zones à piquer sont choisies pour renforcer la difficulté de la chasse aux globules rouges. Par exemple, il vous faudra attendre un instant bien précis pour pouvoir piquer la mère sur la plante des pieds, ou pouvoir viser la paupière gauche d’Ayaka, la copine en short moulant de Rena, qui se mettra à quatre pattes pour l’occasion (c’est justifié par le scénario, hum…). Le fait que MISTER MOSQUITO ne soit pas dénué de challenge est une bonne chose – surtout que les maps sont certes intéressantes à explorer, mais au bout d’un moment on en fait quand même le tour. Pour corser le tout, sachez que les habitants de la maison pourront bien évidemment vous repérer – ne passez pas sous leur nez, prenez également garde au bruit que font vos petites ailes musclées ! Par conséquent, gardez toujours un œil sur la jauge prévue à cet effet, et qui vous permet de savoir si vous commencez à attirer l’attention de vos futures victimes… Oui, MISTER MOSQUITO est presque un jeu d’infiltration^^. Infiltration intraveineuse ? Aussi : bien sûr, dans MISTER MOSQUITO il sera question d’injection. Lorsque vous avez ciblé la zone à sucer, votre moustique se lance dans une attaque en piqué (mais littéralement) et enfonce son « dard » avec gourmandise et rapidité. Mais ce n’est pas fini ! Comme je l’ai déjà précisé, MISTER MOSQUITO est un jeu à part entière, varié et doté d’un gameplay bien pensé. Durant ces périodes de succion, il faut « sucer » en rythme – tournicoter le stick droit du pad ni trop vite, ni trop lentement, pour rester dans les limites (variables et évolutives) d’une jauge bleue placée sur la gauche de l’écran. Et ce n’est pas si évident, car votre victime peut fort bien commencer à se douter de quelque chose – là aussi, le risque est illustré à l’écran par un graphique coloré (un rythme cardiaque). S’ensuivent alors de grandissimes séquences de succions, durant lesquelles il conviendra de gérer à la fois le rythme de votre piqûre, garder un œil sur les réactions de la personne sur laquelle vous aurez jeté votre dévolu et constamment peser le pour et le contre concernant la suite à donner aux évènements : poursuivre l’extraction du sang encore une ou deux secondes pour terminer le niveau tout en prenant le risque d’éveiller la curiosité de votre victime voire de vous faire lamentablement écraser sans préavis, ou vous contenter de peu, prendre du recul et donc de revenir plus tard à l’assaut ? Tout cela n’est pas anodin puisqu’en cas de game over, vous recommencez le niveau depuis le début – tous les secrets que vous aurez récupérés, tout le sang que vous aurez emmagasiné jusque-là seront réinitialisés. Bonjour le stress !

En cas de combat, c’est-à-dire si la personne s’aperçoit de votre présence (pendant des succions ou parce que vous aurez fait trop de bruit en vol), le gameplay évolue encore pour adopter les atours d’un duel à mort ! Durant ces phases d’action, vous ne pouvez plus vous cacher – la personne sait que vous êtes dans la pièce, elle n’abandonnera pas ses recherches avant d’éprouver la jouissive satisfaction de vous écrabouiller avec une terrible violence revancharde. Et ne me regardez pas comme ça : je suis sûr que vous avez été maintes fois dans cette situation, à tourner dans tous les sens pour retrouver ce moustique qui avait eu l’outrecuidance de pomper votre sang avec l’élégance et l’efficacité d’un sniper professionnel ! Mais alors… Si la personne en question n’abandonne jamais sa traque, comment faire pour la piquer ? Il y a une feinte – aucunement réaliste, mais comme je l’ai déjà dit, MISTER MOSQUITO n’est pas réaliste, c’est un jeu vidéo décalé avec ses challenges et ses idées étranges qui se veulent avant tout ludiques – afin d’entretenir amoureusement l’intérêt du joueur conquis. Par conséquent, durant un combat et si vous souhaitez avoir une chance de reprendre votre collecte de sang, il conviendra de « calmer » votre opposant. Pour ce faire, il faudra réaliser des attaques en piqué sur des points bien précis de l’épiderme de ce dernier – indiqués par une marque rouge. Oui, votre moustique se transforme alors en acupuncteur zen de l’impossible ! Et ce n’est pas toujours évident, puisque la personne que vous visez bouge beaucoup, saute parfois, et remue les bras et les mains pour tenter de vous éclater en plein vol. Contrairement au vol 370 de Malaysia Airlines, cette fois-ci on sera en mesure de connaître la raison du crash ! Si j’aime beaucoup ces phases de combat, je dois aussi avouer qu’elles sont parfois crispantes : la maniabilité du petit moustique y affiche en effet ses limites. Rien de rédhibitoire cependant, même si sur la fin, vous risquez de faire une crise de nerf carabinée – le niveau 11 est affreux au possible, le père est suréquipé en insecticides et il dispose d’une espèce de pouvoir spécial en forme de Kaméhaméha qui tue souvent en un coup. Et je vous assure que ça en devient limite insupportable : on meurt en quelques secondes, et on doit donc se retaper un long chargement suivi de la cinématique d’intro que l’on ne peut pas zapper.

Si on ferme les yeux sur l’intransigeance de ce niveau 11 et sur quelques batailles un brin frustrantes, et si on n’est pas un obsédé des textures, difficile de dire du mal de ce MISTER MOSQUITO. Le jeu est en effet très plaisant : on peut s’amuser à prendre notre temps, explorer, dénicher des secrets (pour éventuellement « survivre » à l’été ?), il y a également des interactions propres à certains niveaux (le four à micro-ondes, l’air conditionné qui nous repousse, le téléphone portable…), l’humour est omniprésent et les personnages, attachants. Surtout, le gameplay est relativement varié, un peu technique et chaque pièce de la maison est véritablement bien pensée – on pourra malgré tout regretter que ladite maison ne soit pas plus grande… Mais ça, je crois que beaucoup de Japonais habitant dans des villes ou leurs proches périphéries se disent la même chose !

Note :   Nostalgie :

MISTER MOSQUITO n’est aucunement un mauvais jeu, un kusoge, auquel on jouerait quelques instants pour se marrer mais qui se révèlerait injouable sur la durée. Oui, avec MISTER MOSQUITO les développeurs ont réussi le tour de force de livrer un véritable simulateur de moustique : on s’y croirait ! La gestion de la profondeur et des distances dans chacune des pièces de la maison est bien fichue, on a vraiment l’impression d’être minuscule et d’être un figurant dans un kaiju eiga – avec les habitants de la maison dans le rôle de Godzilla. Ajoutez à cela un gameplay varié, de l’humour et pas mal de secrets et upgrades à débloquer, et vous obtenez un jeu à ne surtout pas sous-estimer, sur PS2. Une suite, au gameplay remanié et intitulée LET’S GO TO HAWAII, est sortie au Japon uniquement, en 2003.

Images : divers sites japonais

Vidéo :

 

0 réflexion au sujet de « Ka (PlayStation 2, 2001) »

  1. Je l’avais loupé à sa sortie, mais grâce au Playstation Store JP sur PS3, je me le suis pris (ou je crois qu’en fait c’est la suite que j’ai), faudrait que je teste à l’ocaz, de préférence en soirée avec des potes qui pourraient être réceptifs ^^ Ton avis donne bien envie en tout cas

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