SOL DIVIDE
Année : 1998
Studio : Psikyo
Éditeur : Atlus
Genre : donjons abscons et dragons
Joué et testé sur PlayStation
Support : CD-ROM
L’empereur Ifter souhaite étendre son influence, sa cruauté voire ses démences sur l’ensemble des royaumes. Ne reculant devant rien, et surtout pas la magie noire, il se transforme en démon pour répandre la terreur. Trois combattants vont trouver le courage de se dresser en travers de son chemin. Vorg, un chevalier noir sans pitié et autrefois trahi par Ifter. Sa soif de vengeance se manifeste par la puissance de son épée, capable de causer de terribles dégâts. Kashon, l’élégant homme-oiseau, prince de Nerafai, aussi efficace à distance qu’au corps à corps. Et enfin Tyora, une mage qui préfère éviter les mêlées et projeter de loin de rapides et puissantes attaques magiques grâce à son précieux bâton.
SOL DIVIDE divise. Avec ses graphismes qui donnent l’illusion d’avoir été digitalisés, ses vagues ennemies paresseuses et ses mécaniques poussiéreuses, le jeu de Psikyo, déjà un peu désuet à l’époque de sa sortie, semble avoir pris un gros coup de vieux – et non, je ne parle pas du coup de poing d’un politicien japonais ! Souvent décrit comme le vilain petit canard de l’écurie Psikyo, naviguant entre navet et nanar, tombant de Charybde en Scylla, de diatribes en joueurs las, SOL DIVIDE a au moins une qualité criante : il ne laisse personne indifférent !
Si je comprends la plupart des critiques, je ne les partage pas. Tout d’abord le jeu de Psikyo serait laid – je ne suis pas d’accord, j’aime beaucoup l’ambiance qui s’en dégage, et si le mélange des genres frise parfois le grotesque (des abeilles géantes y côtoient des chevaliers volants, des yeux protubérants, des champignons aux extrémités digitées, et des dragons), on finit par s’y faire. Certains boss sont même, je trouve, particulièrement jolis et imposants. Le tout couplé à des musiques médiévales assez étranges mais délicieuses achève de faire basculer le joueur dans un univers Heroic-Fantasy résolument typé années 70 et 80. Sur le fond aussi, le jeu est souvent victime des critiques les plus acerbes qui soient. Il faut bien avouer que SOL DIVIDE tend le bâton, disons même le fléau d’armes bien moyenâgeux pour se faire battre : les niveaux sont extrêmement courts, et le level design est ici réduit à sa portion congrue – des vagues d’ennemis qui arrivent une par une, de la droite vers la gauche, dotées de patterns très… ternes. Il y a bien quelques embranchements durant la partie, nous menant çà et là sur la carte du monde, nous permettant ainsi de découvrir d’autres boss, mais les niveaux nouvellement parcourus sont toujours aussi minuscules. Pour une déception majuscule ?
Eh bien au risque de vous surprendre, aucun des défauts listés ci-dessus ne me dérange vraiment. Au contraire même, je trouve qu’ils renforcent le côté pulp, surréaliste du jeu, c’est difficile à expliquer mais grâce aux illustrations de Terada Katsuya, j’ai parfois eu l’impression de feuilleter Métal hurlant ou USA Magazine… pour vivre des aventures courtes et, assassines. Surtout le gameplay, bien que loin d’être parfait, se révèle étrangement plaisant. Bourrin mais plaisant ! Le sprite de notre personnage étant assez grand, il est parfois difficile d’éviter les tirs ennemis, aussi la meilleure défense reste toujours l’attaque. Bien évidemment il est possible de tirer à distance, mais dans SOL DIVIDE les plus gros dégâts se font au corps à corps, et il faut frapper vite : si vous touchez avec une attaque au corps à corps, vous annulez celle de votre adversaire – attention car la réciproque est aussi vraie ! Il faut donc absolument placer la plus grosse attaque imaginable en premier, si possible sur un pack d’ennemis (oui on peut – il faut – toucher plusieurs adversaires en même temps) avec le combo carré-carré-carré-droit-carré. Il s’agit du combo de Kashon, l’homme-oiseau maudit et zélé, le meilleur des trois personnages disponibles (les autres ont un combo différent et moins intuitif). SOL DIVIDE propose aussi de nombreux sorts magiques à psalmodier – qui sont aussi impressionnants qu’essentiels, allant du jet de flamme peu couteux mais pas très dangereux, à l’invincibilité temporaire ou à la pluie de météores illuminant le ciel.
Adoré par certains, abhorré par d’autres, personnellement j’ai choisi mon camp : SOL DIVIDE me procure à chaque fois un plaisir aussi improbable que divin, en particulier sur PlayStation qui propose une conversion parfaite de l’arcade, avec une difficulté modulable, et le sacrosaint 1CC donc parfaitement envisageable – pour moi c’est en easy, au-delà je peux terminer le jeu mais en utilisant plusieurs crédits, la faute à un quadruple boss final aussi impressionnant qu’infernal ! Certes le jeu est court, mais c’est aussi aux joueurs de se prendre en main, en se fixant leurs propres limites et défis. Mieux : pour le portage de son jeu sur consoles de salon, Psikyo n’a pas fait les choses à moitié – un nouveau mode a ainsi été rajouté. L’Original Mode. Il s’agit du même jeu mais avec cette fois comme objectif de parvenir au dix-septième sous-sol d’un donjon – oui, c’est long ! L’Original Mode a une différence de taille avec l’Arcade Mode : Psikyo y a injecté une dimension RPG (monter nos stats, nos magies, notre nombre d’objets, etc.) voire un côté Rogue-like (en cas de mort, on retourne au tout premier niveau, sans nos objets, ni nos magies, mais avec nos stats divisées par deux et la conservation de notre niveau global). Une gemme bleue, un objet assez rare, permet au joueur de revenir au tout début du jeu mais en conservant tous ses attributs, objets et statistiques. C’est essentiel pour progresser : oui vous devrez revenir plusieurs fois au tout premier niveau pour espérer voir un jour le bout de ce tunnel rempli des remugles de vos quêtes précédentes, car le sprint final est particulièrement relevé, avec un tout dernier boss original mais aussi, à mon sens, un peu abusé – pour vous en sortir, préparez un bon stock de sorts parmi les plus puissants existant, ainsi que quelques potions d’énergie. Et un instant pour prier.
Souvent raillé pour son apparence et sa prétendue médiocrité, SOL DIVIDE a bien au contraire du chien, une espèce de charme bancale et vénéneux un peu à part dans le monde des shoot’em up, jusqu’à son gameplay assez original avec un héros pouvant frapper au corps à corps, puisqu’il possède une arme. Quant au jeu lui, il frappe au cœur, puisqu’il a une âme.
SOL DIVIDE a bien des défauts, mais son originalité et son ambiance font, selon moi, incontestablement pencher la balance du bon côté. En effet ce shoot’em up médiéval fantastique, qui propose des boss assez dantesques, se joue aussi bien à distance qu’au corps à corps. Alors attention aux différents monstres, parfois ça pique, ça mord ! La version PlayStation propose une conversion parfaite de l’arcade avec en sus un mode original teinté de rogue-like, et assez intéressant. Vous pouvez oublier la version PlayStation américaine, bâclée (pas de sauvegarde possible dans l’Original Mode, contrairement à la version japonaise, ce qui change tout !). Si seule la version arcade originelle vous intéresse, je vous conseillerai l’excellente compilation PSYKYO SHOOTING LIBRARY VOL. 1, disponible au format physique sur les consoles Switch et PlayStation 4.
Images : Jeux video et des bas/YouTube (PlayStation et Saturn)
Vidéo (mon 1CC en easy version arcade, jouée sur PlayStation 4 – compilation Psikyo Shooting Library Vol. 1) :