SHADOW WARRIORS
Année : 1990
Studio : Teque Software
Éditeur : Ocean
Genre : ninjeutsu
Joué et testé sur Amiga 500
Support : disquettes
En 1999, un redoutable démon venu d’Orient souhaite ravager le monde, en commençant par les États-Unis et leurs mégapoles. À la tête d’une véritable armée, constituée de mercenaires sans foi ni loi, de loubards, d’anciens prisonniers qui se sont fait la malle mais aussi de vrais maitres en arts martiaux comme ces lutteurs de sumo corrompus, le démon ne craint qu’une chose : les Shadow Warriors, les descendants d’une longue lignée de ninjas surdoués, guerriers des ombres, qui n’hésiteront pas, cette fois, à lutter en plein jour pour faire triompher la justice. Capables de frapper fort mais aussi d’effectuer des sauts périlleux absolument renversants, les Shadow Warriors vont, ici, livrer le combat de toute une vie.
L’Amiga avait beau être une formidable machine, pour les conversions d’arcade, le résultat relevait hélas souvent de la blague. SHADOW WARRIORS (le premier NINJA GAIDEN !) fait partie des belles exceptions en la matière, et même si de jeunes joueurs le trouveront aujourd’hui affreusement lent et rigide, il faut garder à l’esprit que la borne d’arcade originelle date de 1988 – la même année que VIGILANTE d’ailleurs, un autre hit patenté des salles d’arcade enfumées, qui pourrait lui aussi, désormais, être jugé un peu rouillé.
Sur Amiga, le jeu est diablement beau : les couleurs pètent au visage, les détails inondent l’écran, les ennemis ont de super trognes bien identifiables, bref le joueur en a pour son argent. Le gameplay est, de plus, très fidèle à la version arcade : avec le bouton fire on enchaine coups de pied et de poing, il est possible (et essentiel) de projeter les ennemis (enclencher le saut près d’une cible et appuyer sur fire), une épée peut être récupérée comme bonus temporaire (elle fait très mal), notre ninja peut déclencher un saut retourné en prenant appui sur les murs ou s’accrocher à une barre fixe pour balancer des coups de pied, et le jeu se joue toujours sur plusieurs plans lorsqu’il y a des plateformes faisant office de « premier étage ». SHADOW WARRIORS étant particulièrement difficile, il conviendra de bien utiliser les décors et détails précités pour survivre : jouer au jeu du chat et de la souris avec les ennemis (passer d’un étage à l’autre), bloquer une grappe d’adversaires contre un mur pour minimiser les risques de riposte, les contourner ou avancer doucement (ce qui fait apparaitre les ennemis par plus petits groupes) pour éviter d’être submergé, et tenter de les projeter sur certains éléments destructibles pour obtenir de précieux bonus – ensiformes, ressemblant à des gélules ou à des pierres précieuses, etc.
Les niveaux sont toujours aussi variés et clairement identifiables, donnant une impression de 3D permettant ainsi au joueur d’utiliser la profondeur, avec ici des rues à traverser en risquant de se faire renverser, là des quartiers malfamés aux murs délabrés, ou encore une balade nocturne près d’un fleuve de New York ponctuée par des attaques de bikers, et enfin ce soleil caniculaire qui parait devoir nous écraser en plein désert du Nevada. Au total, ce sont six niveaux qui attendent le joueur, pour une quarantaine de minutes amusantes mais aussi assez stressantes : les coups encaissés font vraiment mal, certains passages peuvent soudainement nous faire perdre une vie (chute dans le vide, aka le ninja gadin) et les ennemis arrivent parfois comme des bières, par pack de six ! Heureusement les boss sont, curieusement, assez faciles à battre (même le dernier), mais pour tout le reste il faut vraiment s’accrocher, être toujours concentré. Ça finit presque par devenir épuisant, aussi vaut-il peut-être mieux jouer au jeu à deux, en coopération – pour deux fois plus de jurons ?
SHADOW WARRIORS a, selon moi, deux gros défauts. Le premier est minime : il n’est pas possible de jouer en profitant des (bonnes) musiques et des sons en même temps. Pire, en émulation seules les musiques semblent disponibles – de nombreuses personnes, moi inclus, ne parviennent pas à basculer en mode SFX (il parait aussi que ça dépendrait de la version du jeu…). Et c’est dérangeant, car lorsqu’un joueur se défoule sur un jeu d’action, il aime distinguer le bruit des coups, écraser ses ennemis, les voir mourir devant soi et entendre les lamentations de leurs femmes. Euh, je m’égare, je crois… Bref, le second problème de SHADOW WARRIORS est, hélas, plus conséquent : le jeu est affreusement lent ! Certes le même titre sur borne d’arcade n’était pas un foudre de guerre non plus, mais là, on a souvent l’impression de jouer au ralenti sitôt qu’il y a plus de trois personnages à l’écran. Un paradoxe éclot alors : le jeu d’Ocean devient aussi stressant, en raison de sa difficulté, que lénifiant, à cause de son rythme.
SHADOW WARRIORS sur Amiga est tout autant un éclair de génie, que de déni. Certes la conversion est bonne, pour l’époque et pour la machine, surtout lorsqu’on la compare à d’autres adaptations d’arcade complètement ratées. Mais si vous entendez certains Amigaïstes tresser des lauriers au jeu d’Ocean, ne vous étouffez pas avec, et prenez le temps d’aller voir ce qui se faisait sur consoles de salon la même année, en 1990. D’ailleurs j’ai toujours regretté qu’un tel jeu n’ait jamais été adapté sur consoles 16 bits – une version Megadrive était bien dans les tuyaux, mais elle fut annulée.
Note : Nostalgie :
Une intro complètement dingue, une musique incroyable et le jeu qui se lance enfin, dévoilant une ville glauque mais magnifique, parfaitement retranscrite et colorée, ainsi que des sprites grands et expressifs. Les enfants du début des années 90, au regard médusé, s’en souviennent encore. SHADOW WARRIORS, premier jeu de la franchise NINJA GAIDEN et grand succès des salles d’arcade à la fin des années 80, fut porté sur de nombreux ordinateurs et sa version Amiga 500 est toujours célébrée de nos jours. À raison : ce beat’em up s’y révèle particulièrement jouable, et beau. Hélas, sa lenteur et quelques sauts douteux seront rédhibitoires pour les plus jeunes joueurs.
Images : LemonAmiga
Vidéo :