ACONCAGUA
Année : 2000
Studio : Sony
Éditeur : Sony
Genre : avalanche de cliffhangers
Joué et testé sur PlayStation
Support : CD-ROM
Meruza est au bord de la guerre civile. L’armée aurait décidé de se débarrasser de Pachamama, l’opposante politique qui souhaite ramener son pays sur les rails de la démocratie. Pour faire une croix sur le futur de la femme de 33 ans, l’armée ne prendra pas de gants, et décidera de détruire son avion. Après le crash au-dessus de montagnes séculaires, surplombées par le mont Aconcagua, les survivants s’organisent : Katô, un journaliste japonais et alpiniste de renom, retrouve rapidement Pachamama et son garde du corps, ainsi qu’une journaliste américaine, Julia, et Steve, un mécanicien émérite. Leur premier souci ne sera pas de survivre à la faim et au froid… mais d’échapper aux nombreux soldats envoyés pour terminer la sale besogne.
ACONCAGUA est un jeu assez étrange. Sous son ramage fait de nombreux dialogues, de point et de click, son plumage révèle en fait une aventure bien plus proche d’un LOST VIKINGS que d’un SECRET OF MONKEY ISLAND. Ici, inutile de chercher des objets de la taille d’un pixel dissimulé dans un coin improbable de l’écran. Pas la peine de se triturer l’esprit pour trouver quel objet utiliser avec telle machine – dans ACONCAGUA tout se fait le plus simplement du monde, et une interaction qui demanderait des circonvolutions abstraites dans un pur point and click se fait ici très facilement : on place notre personnage plus ou moins près d’une porte par exemple, et il suffit alors de cliquer sur la clé dans notre inventaire pour ouvrir la porte en question. Beaucoup d’interactions se font aussi par les dialogues : discuter avec tel ou tel personnage déclenchera éventuellement une action. C’est l’une des grandes originalités du jeu développé par Sony : dans cette aventure il ne suffit pas que le joueur comprenne l’action à effectuer pour avancer. Il faut que les personnages en prennent conscience, littéralement : en regardant un objet, puis en discutant de la chose avec l’un des membres du groupe, par exemple.
À mon sens, les mécaniques d’ACONCAGUA se rapprochent donc beaucoup de celles d’un LOST VIKINGS – ou d’un TRINE, pour les plus jeunes. Vous contrôlez ainsi un groupe de 4 à 5 personnages, qu’il est possible d’incarner à tour de rôle via les gâchettes L1 et R1, et chacun d’entre eux possède des caractéristiques, des capacités voire une personnalité propres. Katô, qui aurait pu jouer dans CLIFFHANGER, est un alpiniste confirmé et peut escalader de nombreuses parois, Steve est une grande gueule mais aussi le mécanicien du groupe, Julia est une journaliste étrangement très habile avec un couteau, Lopez est une montagne de muscles et Pachamama, enfin, sait parler espagnol – ne rigolez pas, amigos, ce sera utile plus d’une fois.
L’autre point très original d’ACONCAGUA est son ambiance : les rescapés d’un crash en pleine montagne, dans un pays fictif d’Amérique du Sud (s’inspirant bien évidemment de l’Argentine), devront s’organiser pour s’échapper de cet enfer blanc – et des griffes des soldats qui tenteront régulièrement de capturer l’opposante politique Pachamama, leur cible initiale. Les dialogues sont très souvent doublés en anglais, parfois en espagnol, le tout pour coller à l’identité des personnages et des lieux (et peut-être pour gagner le marché sud-américain… même si finalement le jeu n’y fut jamais distribué). Ça fait un bien fou pour l’immersion. Attention néanmoins : de nombreux textes ne sont pas lus, aussi il vous faudra comprendre le japonais pour profiter pleinement du jeu – mais comme ACONCAGUA n’est pas très difficile, il demeure faisable (mais moins agréable) par une personne non-japonisante.
ACONCAGUA est une véritable pépite d’originalité, une perle… incongrue. Tout n’est pas parfait dans le jeu de Sony, loin de là. Mais ce sont peut-être aussi ces imperfections qui font son charme. Déjà techniquement, le jeu n’est pas vraiment joli, les textures sont laides, les personnages rentrent même dedans, parfois. Le principe du jeu pourrait également rebuter celles et ceux qui pensaient avoir affaire à un survival, voire à une aventure classique au format point and click. ACONCAGUA n’est absolument pas réaliste et se rapproche beaucoup, comme je l’ai déjà précisé, d’un LOST VIKINGS : chaque chapitre est à prendre comme une espèce de puzzle en 3D dont il faudra déjouer/dompter les mécaniques en incarnant le bon personnage au bon moment. Qui dit puzzle sous-entend situations très artificielles : vous pourrez ainsi bricoler bruyamment dans un camion puis démarrer sans que le soldat en poste à dix mètres de là n’entende quoi que ce soit… Ce sont des notions à prendre en compte quand on se lance la première fois dans l’aventure – j’ai eu un peu de mal, au tout début.
Mais la magie opère, nos personnages ont beau être aliasés et anguleux, on finit par s’attacher à eux. À plonger tête la première dans l’atmosphère assez unique de ce jeu. Les dialogues, extrêmement nombreux, permettent en effet de tisser des liens avec les différents protagonistes de l’histoire –même si on a droit à quelques clichés faciles, voire à plusieurs scènes assez grotesques : au niveau des incongruités, c’est même rapidement l’escalade – au sens figuré : on est dans un jeu japonais s’inspirant un peu du film CLIFFHANGER, ne l’oublions pas ! Mais oui finalement, la magie opère… le rétrogamer à cœur ouvert.
Note : Nostalgie :
ACONCAGUA se joue comme un point and click, mais ses mécaniques rappellent davantage celles de LOST VIKINGS, avec plusieurs personnages aux capacités différentes, et des chapitres construits comme plusieurs puzzles successifs. L’aspect narratif est également bien creusé, avec de nombreux dialogues qui sont loin d’être anecdotiques : ils donnent une véritable personnalité aux survivants du crash, et se révèlent aussi indispensables à la résolution de certaines « énigmes » (les guillemets, c’est parce que tout cela n’est finalement pas très dur…). ACONCAGUA n’est pas parfait, mais il a le mérite de proposer quelque chose d’original. Un peu comme ZETTAI ZETSUMEI TOSHI, dans un genre différent.
Images : mii5
Trailer :