BODY BLOWS
Année : 1993
Studio : Team17
Éditeur : Team17
Genre : brouillon
Joué et testé sur Amiga 500
Support : disquettes
« The Fight of your Life ! » Le ton est donné : préparez-vous à lutter pour devenir le meilleur combattant au monde. Quatre challengers vont s’en aller défier des guerriers aux profils bien différents : le ninja fourbe qui peut devenir invisible, Maria aussi élastique que ses coups de pied piquent, Kossak qui est hyper résistant et qui peut disparaitre dans le sol, ou encore Dug, gros lutteur qui est capable de faire trembler le sol et donc d’envoyer ses adversaires directement au tapis ! Les quatre jeunes personnes ayant décidé de relever ce défi titanesque sont Nik et Dan, deux frères venus des États-Unis et ayant appris à maîtriser leur énergie pour en faire des projectiles létaux, Junior, un boxeur anglais mais ignorant tout du célèbre flegme britannique : il a été banni des circuits de boxe. Et enfin le redoutable Loray, le très vif moine shaolin.
Des graphismes renversants, des animations extrêmement nombreuses qui s’invitent jusque dans l’habillage des fonds d’écran, des musiques efficaces, des sons puissants et des voix digitalisées… Avec BODY BLOWS en 1993, le studio Team17 mettait les petits plats dans les grands. Mais dans cette course à l’excellence technique sur Amiga, il y a un revers à la médaille (en chocolat) : il faut changer de disquette au moins quatre ou cinq fois entre chaque combat ! Ceux-ci étant particulièrement expéditifs, l’IA se révélant trop souvent hyper agressive, on finit par passer plus de temps à jongler avec les disquettes qu’à distribuer les uppercuts et autres manchettes. Rageant.
Encensé par la presse vidéoludique de l’époque, j’avoue avoir moi-même trouvé le jeu sympa, lors de sa sortie. Mais de là à crier au chef d’œuvre, non. Les journalistes de Gen4 et de Joystick étaient soit habités par une malhonnêteté crasse, soit par une paresse compulsive. Après en avoir vu certains comparer BODY BLOWS à STREET FIGHTER II, je penche pour la seconde hypothèse : ils voulaient sans doute parler de la version Amiga de STREET FIGHTER II (et encore, j’ai parfois un doute en relisant Gen4…). Mais pourquoi taire l’existence de la version Super Nintendo, pourtant disponible depuis quelque temps déjà ? Seul le journal Tilt avait alors cru bon de préciser que le jeu de Team17 était sympa mais qu’il ne soutenait pas la comparaison avec le même genre de titres sur consoles 16 bits.
Atrocement rigide, avec des mouvements trop saccadés pour pouvoir enchainer naturellement les combos, BODY BLOWS dans sa version de 1993 est aussi affreusement injuste, et mal pensé. Les développeurs de Team17, une boîte pourtant talentueuse, avaient-ils les yeux en face des trous lorsqu’ils ont réalisé leur jeu ? J’en doute. Et pour verser dans l’analogie martiale improbable, je dirais même qu’ils avaient toutes les peines du monde à voir clair, à l’instar de ce héros légendaire. Certes, il n’est pas simple d’adapter la formule STREET FIGHTER II sur un Amiga, qui se joue généralement avec un joystick doté d’un seul bouton fire. Mais justement : il aurait fallu créer un jeu de VS Fighting différent, et non pas une copie pâle, très pâle de ce qui se faisait alors au Japon. BODY BLOWS est effectivement un jeu horriblement injuste : à mesure que l’on progresse, les adversaires deviennent de véritables tanks, ils encaissent de mieux en mieux les coups et, bien évidemment, les leurs font de plus en plus mal. La hitbox est mal réglée, les sprites peuvent se superposer, par conséquent si vous êtes suffisamment proche d’un ennemi, celui-ci ne pourra pas vous toucher – enfin cela dépend du coup lâché… Il y a également de nombreuses situations ubuesques où, médusé, on ne comprend pas pourquoi on n’a pas touché : certains ennemis paraissant avoir constamment la « priorité » pour faire mal (Yitu est trop vif, l’homme qui balance des tourbillons idem…). Et je ne parle pas des longues i-frames dont semblent bénéficier certains de ces combattants patibulaires… Kossak en tête – de Turc !
Pire : lorsque l’on envoie un adversaire au tapis, il est impossible d’enchaîner ! Le bouton fire est comme temporairement figé durant deux bonnes secondes. J’ai d’abord cru à un bug, mais en fait non. Les développeurs ont vraiment eu cette idée de génie. Bravo les gars, en matière de tue-l’amour vidéoludique, on pouvait difficilement faire mieux. Cerise sur le gâteau des illusions perdues : le boss final est impossible à battre. Je n’ai trouvé aucune vidéo sur le net pour me contredire. Il s’agit d’un robot en hommage au Terminator, rebaptisé T17 (Team… 17 !). Il spamme les attaques à distance, encaisse les coups comme un bison et… contrairement aux précédents combats, si la limite de temps atteint le zéro, le round est considéré comme un match nul. Oui, même si vous aviez plus d’énergie que lui. Ubuesque. Parce que comme il fait extrêmement mal et qu’il encaisse comme un T1000 (on est loin du T17 en fait !), il est selon moi absolument impossible de le battre dans le temps imparti. Et croyez-moi, j’ai essayé… Je m’y suis usé les doigts plus que de raison. J’en reviens alors à l’une de mes premières remarques : les journalistes vidéoludiques de l’époque étaient-ils habités par une malhonnêteté crasse, ou par une paresse compulsive ? En réalité, il s’agit sans doute un peu des deux, puisque je présume qu’aucun d’entre eux n’avait terminé le jeu avant d’en publier une chronique dithyrambique (un grand merci à Word pour la correction instantanée de ce mot satanique).
Avec ses jolis graphismes, ses décors animés, ses coups nombreux inspirés de STREET FIGHTER II (Nik ressemble à Ryu avec un Hadoken, une espèce de Shoryuken faiblard et un Hurricane Kick du pauvre), ses méchants hauts en couleur aux attaques très variées et ses quatre personnages jouables, BODY BLOWS avait tout du hit en puissance, qui plus est adoubé par une presse vidéoludique en pleine déliquescence. Parce que je ne suis pas fou : BODY BLOWS dans sa version de 1993 est une véritable torture à jouer. La preuve ? Quelques mois après la sortie du jeu, Team17 a dû mettre à disposition des joueurs une « upgrade disk », ou mise à jour, afin de corriger les erreurs rédhibitoires de leur soft – dont le boss final complètement abusé. Si Twitter avait existé à l’époque, je crois que Team17 se serait pris un torrent de plaintes, d’insultes et de frigos en pleine trogne ! Surtout que le studio anglais n’en était pas à son coup d’essai, puisqu’il nous avait fait le même coup avec PROJECT-X : le jeu sorti initialement étant bien trop difficile, une nouvelle mouture vit le jour l’année suivante… BODY BLOWS connut donc le même sort, tout d’abord avec une mise à jour via disquette, puis carrément avec une version remaniée du jeu, éditée en 1994, à destination des Amiga AGA (Amiga 1200…). Et vous savez quoi ? Entre le jeu de 93 et celui amélioré de 94, c’est le jour et l’ennui !
Note : Nostalgie :
Techniquement réussi, mais sur le fond à mon sens complètement bâclé : avec BODY BLOWS, on a le Body Blues… Le jeu est tellement mal équilibré, et mal pensé, qu’il se transforme vite en véritable calvaire. Conscients de leur erreur, même si les magazines de l’époque n’y avaient vu (volontairement ?) que du feu, les développeurs de Team17 ont rectifié le tir quelques mois plus tard via une disquette de mise à jour et surtout l’année suivante sur les Amiga AGA, avec une version complètement remaniée et – enfin – amusante à jouer.
Images : Jeux vidéo et des bas
Vidéo (attention il s’agit de la version avec upgrade disk – reconnaissable aux ombres sous les personnages) :