NEVERAWAKE
Année : 2023
Studio : Neotro Inc.
Éditeur : Phoenixx Inc.
Genre : rêve party
Joué et testé sur PlayStation 4
Support : Blu-ray
Une fillette allongée sur un lit d’hôpital. Elle est plongée dans le coma, et ne bouge plus un doigt. Son esprit, pourtant, semble toujours vivant. Des bribes de mémoire remontent. Dans l’inconscient ? Cette noirceur, ces peurs… sont-elle réelles, reflètent-elles vraiment le passé ? La proximité de la mort et de la maladie pourraient-elles gangréner les souvenirs d’une petite fille ? Eh bien il faudra lutter pour s’en dépêtrer ! Combattre contre les légumes fades, dorénavant semblables à de gigantesques monstruosités ! Retourner à l’école, éviter les brimades, faire face au traumatisme des cours de gym ! Serrer les dents et les poings dans le cabinet du dentiste, ne plus baisser les yeux à l’approche de la seringue ! Retrouver le souffle, le sourire, et l’espoir. Un pari, dingue ?
La Balle au Bois Dormant
NEVERAWAKE conte la tragique histoire d’une petite fille plongée dans le coma. Le joueur n’incarne pas la triste demoiselle au teint ivoirin, mais une espèce d’esprit, noir et peut-être vendu au Malin, qui parait naviguer dans l’inconscient ou les souvenirs de l’intéressée. Avec moi, pas de risque de vous divulgâcher quoi que ce soit, puisque bien qu’ayant terminé le jeu à 100% et obtenu toutes les fins, je n’ai pas vraiment prêté attention à la narration – au point de zapper les cinématiques finales. Ce n’est pas ce qui m’intéresse dans un shoot’em up. Par contre, là où le jeu est réussi, c’est dans sa faculté à retranscrire à l’écran les peurs de la fillette. S’il s’agit d’un cliché éhonté concernant les enfants, son dégout des légumes est ici magnifiquement illustré dans un niveau aux formes étranges, comme un potager tout droit issu de l’enfer, aux courbes folles, illogiques et foliaires rappelant l’inénarrable Arcimboldo. On aura aussi droit au cabinet du dentiste et à l’hôpital avec leurs seringues assassines, à la dictature des réseaux asociaux et aussi à l’école, là encore avec le gros cliché des brimades dans les toilettes, mais le chara design étant résolument grandiose, on ne s’en offusquera pas. Plus drôles, deux des boss de l’école sont vraiment bien pensés : le saut de cheval, cet agrès qui a traumatisé plus d’un élève aux cours de gym reviendra vous faire des misères, et l’animal le plus résistant au monde, à savoir le tardigrade, se rebellera lorsque vous remettrez les pieds dans le petit labo de sciences nat du lycée !
Le Grand Méchant Loop
NEVERAWAKE est un twin-stick shooter assez original. Il s’inspire un peu de FORGOTTEN WORLDS (comme le précise le réalisateur Sawatari Hiroshi dans cette interview) et emprunte aux danmaku leur hitbox et leurs pluies de balles, mais laisse de côté leur difficulté en permettant aux joueurs d’esquiver (un dash salvateur) et d’utiliser une arme spéciale souvent dévastatrice à sélectionner parmi un large arsenal. Outre son ambiance, le game design tire aussi son épingle du jeu vidéo. En fait, les niveaux ne se terminent pas vraiment et tournent éternellement en boucle (de plus en plus difficile), le but étant de récupérer des âmes (en tuant des ennemis). Une fois le quota atteint, le niveau se termine. Idem face aux boss : inutile de les envoyer définitivement au tapis – récupérer un certain nombre d’âmes suffit. C’est assez déstabilisant au début mais on finit par y prendre goût. Et puis ça change des autres shoot’em up. Mieux : une fois le jeu terminé, vous aurez accès à des défis. Tout d’abord les Omoide Challenges, puis les Himitsu Challenges. S’ils ne sont pas tous vraiment passionnants (il suffit souvent de s’équiper de l’arme et des options adéquates), ceux qui nous demandent de tuer le boss, donc en évitant de réunir toutes les âmes afin de pousser la monstruosité dans ses derniers retranchements, m’ont vraiment plu.
Karma Coma
Dans NEVERAWAKE, notre personnage ne cesse pas de progresser, d’emmagasiner des âmes, qui lui permettront d’acheter de nombreuses améliorations. En gros, il apprend, se réincarne. Des armes en pagaille, des objets en veux-tu, en voilà, oui le joueur finira par crouler sous les options. À lui de les choisir selon son style, ses envies, selon le niveau et le défi qui se présenteront, aussi. C’est vraiment fun de débloquer sans cesse de nouveaux jouets, mais le revers de la médaille viendra rapidement doucher les attentes des joueurs confirmés : déjà relativement facile, NEVERAWAKE devient, avec tout cet arsenal, presque trop docile. De ce point de vue-là, il tourne plutôt le dos au genre danmaku, préférant assumer son statut de shoot’em up hybride (on note ainsi quelques clins d’œil à des boss de PARODIUS ou de GRADIUS V, un parapluie vient remplacer les modules déjà vus ailleurs, etc.). D’ailleurs, même les pluies de balles ne sont pas si fréquentes (à moins d’aller loin dans les loops) et sont de plus généralement loin d’être fatales – possibilité d’ajouter de nombreux points de vie en sélectionnant les bonnes options… mais en en sacrifiant d’autres, bien évidemment. À vous de trouver le fragile équilibre qui vous conviendra le mieux.
NEVERAWAKE est un twin-stick shooter extrêmement généreux et particulièrement accessible, dont le gameplay est construit avant tout autour du build (choix des armes et des options parmi une foultitude d’objets) plutôt que sur l’habileté du joueur proprement dite. L’esthète de la boulette me répondra, un brin taquin, que c’est peut-être à l’intéressé de se fixer ses propres malus et limites, par exemple en choisissant, à dessein, des options moins protectrices et viser ainsi le haut du tableau des classements en ligne.
Note :
NEVERAWAKE est un très bon petit shoot’em up, qui vaut avant tout le détour pour ses graphismes et son ambiance, particulièrement réussis. Le gameplay n’est pas en reste, et la multitude d’armes et d’options permet de varier les plaisirs – au détriment de la difficulté, ce qui pourrait refroidir les joueurs les plus exigeants.
Images : 4gamer
Trailer :