Shin Contra (PlayStation 2, 2002)

SHIN CONTRA
Titre alternatif : Contra: Shattered Soldier
Année : 2002
Studio : KCET / Team Kijirushi
Éditeur : Konami
Genre : contrat rempli (de sang, de tripes et de boyaux)
Joué et testé sur PlayStation 2
Support : CD-ROM


Planète Terre, 2642 A.D. Le monde a été défiguré par les conflits précédents, et 80% de la population a été décimée. Bill Rizer, le héros des Alien Wars, tenu aussi pour responsable de la mort de son compagnon d’arme Lance Bean, fut choisi comme bouc émissaire et condamné à 10000 ans de réclusion dans une prison cryogénique. Mais cinq années plus tard, la Terre doit faire face à une nouvelle menace : Blood Falcon. Cette organisation terroriste, dirigée d’une main de fer par un mystérieux commandant aux pouvoirs surhumains, répand le chaos et la destruction partout sur le globe. Le gouvernement terrien, appelé Triumvirate, n’a qu’une solution : réveiller Bill Rizer et l’envoyer une nouvelle fois au front. Pour le seconder, le Triumvirate fera appel à un cyborg, du nom de Lucia.

Souvent louée pour ses grands jeux sur Famicom et Super Famicom, la série CONTRA ne doit pas être uniquement envisagée à travers le prisme 8/16 bits, bien trop étroit. Si je préfère passer sous silence les opus PlayStation, développés par un obscur studio européen, il convient de se pencher sur les deux épisodes concoctés exclusivement par Konami pour la PlayStation 2, et qui sont rarement cités. Il faut dire qu’à l’époque, sortir de tels jeux relevait presque de la gageure, les joueurs n’ayant d’yeux que pour les progrès technologiques, et cette 3D venue d’ailleurs – TOMB RAIDER, RESIDENT EVIL, METAL GEAR SOLID 2 et j’en passe. SHIN CONTRA, datant de 2002, était déjà considéré comme old-school par les journalistes et le grand public, lors de sa sortie ! Je ne leur jette pas spécialement la pierre. Nous étions alors, moi le premier, davantage tournés vers les jeux de nouvelle génération, avides de nouvelles expériences et sensations.

Construit en forme d’hommage aux épisodes précédents, et de dommage aux joueurs imprudents, SHIN CONTRA est un maelström de séquences folles, une succession de fusillades variées et ultra rythmées, un déluge de boss aux formes démentielles, un chaos apparent et cataclysmique, enivrant. J’ai choisi le terme apparent à dessein, car en réalité le jeu de Konami ne laisse rien au hasard, tout y a été pesé et soupesé, millimétré. Bien évidemment, vous allez mourir, rager, lever les bras au ciel et éventuellement insulter la Terre entière (sauf votre mère). Mais le jeu n’est pas injuste, loin de là, puisqu’il a été pensé pour vous faire progresser. Tout d’abord, vous pouvez choisir l’ordre des niveaux parmi quatre. Cela permet de vous perfectionner, de refaire certains passages et de finalement les maitriser : les patterns des boss sont à l’ancienne, en gros et même si les réflexes demeurent importants, il conviendra surtout de mémoriser les routines des monstres bedonnants qui vous barreront la route plus que de raison.

Avec trois armes dans votre arsenal, et aucune à récupérer en chemin, Konami vous donne de suite les clés de son coffre à jouets torturés : il faudra donc vous habituer à changer d’arme à la volée, et apprendre à utiliser chacune d’entre elles, au bon moment – certaines sont en effet plus efficaces contre certains ennemis… même si cela dépend aussi de votre façon de jouer. Mieux : ces armes disposent toutes d’un tir secondaire, souvent particulièrement destructeur. La mitraillette de base est utile en toute circonstance, le lance-flammes est agréable à manier mais c’est surtout son tir secondaire qui est indispensable (en effectuant une pression plus longue sur le bouton, on envoie une petite boule de feu extrêmement puissante), quant aux mines elles ont aussi leur utilité, et leur tir secondaire (des missiles à tête chercheuse) se révèlera précieux à de nombreuses reprises. Vous aurez donc le choix des armes, mais aussi des larmes : les yeux de vos adversaires devraient en effet pleurer face à vos assauts répétés, et diaboliquement variés. Grace à une maniabilité sans faille, SHIN CONTRA permet en effet au joueur d’assener d’innombrables coups de boutoir et ce, de nombreuses manières différentes – avec les gâchettes L1 et R1, vous jonglerez avec vos trois armes, tandis que les boutons carré et rond vous permettront d’actionner le tir normal ou secondaire. Les gâchettes L2 et R2 ne seront pas à négliger non plus, puisqu’elles seront nécessaires pour bloquer le tir dans une direction donnée – L2 pour bloquer le tir tout en continuant à bouger (souvent courir, ou reculer), R2 rendant le personnage immobile tout en lui permettant de tirer dans toutes les directions. Il vous sera bien évidemment possible de sauter, vous mettre à plein ventre ou accroupi, et comme le veut la tradition des CONTRA, vous pourrez aussi vous agripper à certains endroits, chevaucher des motos et des missiles, voire escalader des parois. Il faut un temps d’adaptation mais une fois prise en main, la maniabilité de SHIN CONTRA fait un tabac !

Les niveaux sont relativement courts mais fort bien pensés, avec des pièges retors et variés. Quant au bestiaire, il est extrêmement impressionnant, les boss pullulent et certains d’entre eux, particulièrement repoussants et purulents, paraissent tout droit sortis d’une œuvre d’art et d’horreur affreuse et démente, prête à vous terrasser d’un baiser maudit, de ses lèvres d’amiante. J’espère que vous avez l’estomac bien accroché, car vous risquez bien de finir écorché – vif ! Dans SHIN CONTRA, on va vous vomir dessus, vous écraser, vous brûler vivant, vous projeter dans un broyeur, vous noyer… bref, les masochistes vont adorer ! Le tout est, de plus, mis en scène avec une science aiguë du détail : la transformation du méga-robot sous-marin, le piranha géant aux traits torturés qui va briser un barrage pour vous engloutir, le duel final sur un avion en feu, l’attaque de ce train qui va dévoiler ses pièges à la manière d’une poupée gigogne sadique, le boss du niveau 3, cette espèce de centipède mécanique qui va vous poursuivre avant de vous dépasser et de vous bloquer le passage… Le jeu, à peine miné par des musiques peu inspirées, est épique au possible, rempli de scènes hallucinantes et inoubliables.

Concernant la difficulté, elle est bien évidemment relevée. Une balle qui vous touche, un nuage d’haleine fétide ou un bain d’acide qui vous frôle, et c’est la mort subite. Dur, dur d’être imbibé ! Lucide, vous remarquerez sans doute que vous disposez de plusieurs vies, et que l’on réapparait immédiatement. Et même une fois notre stock de vies épuisé, il est possible de reprendre à un checkpoint (généralement à la moitié du niveau). Par contre, une fois que la source de vos continus sera tarie, c’est l’impitoyable faucheuse de la mort qui se penchera sur votre carcasse rouillée : le jeu ne sauvegarde pas vraiment votre progression – n’oubliez pas que vous devez terminer les quatre premiers niveaux pour accéder au cinquième, et finir alors le jeu avec au moins un rang A pour débloquer les deux ultimes niveaux et éventuellement avoir l’immense privilège de voir la vraie, et bonne fin de l’aventure ! Mais en cas de gamer over, pas de bouée de sauvetage qui tienne : il vous faudra tout reprendre depuis le début. Dur ! Mais pas insurmontable : le jeu est pensé pour faire progresser le joueur.

Au début, vous allez mourir. Beaucoup. Mais grâce à vos plusieurs vies et continus, vous progresserez immanquablement dans les niveaux – le fait de pouvoir choisir parmi les quatre premiers n’est pas anecdotique, et permet de s’entrainer. D’ailleurs une fois un niveau terminé, il vous sera possible d’y accéder en mode entrainement, via le menu des options – avec 30 vies dans le baluchon (en Occident, il s’agit du mode easy il me semble). Vous vous surprendrez donc à mieux maitriser certains passages, et boss, pour finalement parvenir au génial et cataclysmique niveau 5 – que vous finirez aussi par vaincre. Personnellement il m’a fallu douze parties et environ six heures de jeu – oui SHIN CONTRA ne sauvegarde pas vraiment notre progression dans les niveaux, mais garde un certain nombre de statistiques en mémoire malgré tout (d’ailleurs au bout d’un certain nombre d’heures de jeu, on se voit ajouter une ou deux vies à notre total de base). C’est alors que les choses sérieuses commencent : finir le jeu (soit les cinq premiers niveaux) avec au moins un rang A, pour accéder aux deux derniers chapitres. En gros, SHIN CONTRA vous lance un défi en forme de pied de nez (ou clé de bras, ou corde au cou, ça fait plus mal) : vous parvenez dorénavant à le terminer sans encombre, eh bien il vous faudra désormais être capable de le finir avec style ! Soit perdre le moins de vies possible, et surtout avec un Hit Rate proche du 100% – cela revient en réalité à dézinguer absolument tout ce que vous croiserez dans un niveau, afin que vous puissiez vous approprier cette célèbre tirade de Bill Munny : « I’ve killed everything that walks or crawls at one time or another ». Et c’est loin d’être évident, car pour parvenir à cela, vous devrez par exemple exterminer les boss à 100%, c’est-à-dire détruire toutes leurs parties et étranges protubérances, même celles qui sont optionnelles – ce qui aura pour effet rance de déclencher des patterns que vous aviez sans doute intelligemment évités jusque-là. Ce n’est pas facile, mais encore une fois, on progresse régulièrement : il m’a fallu trente parties et douze heures de jeu (temps d’entrainement non comptabilisé) pour conclure cette aventure en beauté.

Rétro dans l’â(r)me, SHIN CONTRA est à mon sens un jeu qui a bien vieilli, car il pouvait déjà être considéré comme une antiquité lors de sa sortie. Oui, ses rides sont d’origine ! Construit en forme d’hommage aux précédents opus par Nakazato Nobuya, déjà à la barre des jeux sortis sur Super Famicom et Megadrive, SHIN CONTRA représente un défi ambitieux mais très valorisant, et loin d’être surhumain.

Note :   Nostalgie :

SHIN CONTRA est à mon sens un grand run & gun, passé plus ou moins inaperçu à l’époque parce que la majorité des joueurs attendaient que les développeurs fassent sortir les tripes de leur PlayStation 2. Eh bien de tripes, il sera pourtant bien question avec SHIN CONTRA : ça gicle, ça explose, c’est crade, à la fois organique et mécanique… tout simplement mémorable. Jouable à deux (je n’ai pas essayé), SHIN CONTRA propose des niveaux courts, presque du pur boss-rush, d’une difficulté relevée mais pas injuste. On progresse sans cesse dans ce qui est sans doute l’un des trois ou quatre meilleurs jeux de la franchise CONTRA.

Images : dengeki

Preview au Tokyo Game Show 2002 :

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