MAD PANIC COASTER
Année : 1997
Studio : Hakuhodo
Éditeur : Hakuhodo
Genre : faire du neuf avec des grands huit
Joué et testé sur PlayStation
Support : CD-ROM
Un savant fou répondant au nom de Docteur Jones, et qui n’a plus grand-chose d’humain, a travaillé des années durant sur un projet de montagnes russes, dans l’optique de créer la meilleure et la plus dangereuse attraction au monde. Deux écoliers, Bakuyan et Kyako, sont désignés pour les tester. En tout, ils devront survivre à quinze circuits complètement dingues et truffés de pièges, d’obstacles, de monstres étranges voire de… trous ! Pire, les pistes ne sont dotées d’aucun rail ni d’aucune rambarde de sécurité : pour éviter de tomber dans le vide, Bakuyan et Kyako devront diriger le wagonnet manuellement ! Survivront-ils suffisamment longtemps pour affronter l’esprit dérangé derrière tout ça ?
MAD PANIC COASTER est un jeu qui, comme les montagnes russes qu’il met en scène, a connu une trajectoire peu banale. Développé par une compagnie qui n’avait rien à voir avec les jeux vidéo, MAD PANIC COASTER détonne et étonne, que ce soit en raison de ses qualités (le jeu est bien réalisé et très original) ou de ses défauts qui finissent par devenir attachants, puisqu’ils nous éjectent violemment de notre zone de confort – faut-il être un peu maso ?
Le jeu est relativement simple : sur fond de musique rock, on se retrouve à bord d’un wagonnet qui s’élance sur les montagnes russes les plus folles et dangereuses imaginables. Il n’y a pas de rambardes de sécurité ni de rails, par conséquent on est susceptible de tomber dans le vide à chaque mauvaise manœuvre (en gros à chaque seconde) – les flèches gauche et droite servent à rabattre le wagonnet au centre de la piste, quant à celle du bas elle permet de ralentir, mais demeure très difficile à utiliser dans le feu de l’action. Honnêtement ça va tellement vite que l’on a à peine le temps de ciller, tant et si bien que décaler son pouce gauche vers le bas pour ralentir revient à prendre un risque insensé. Dans MAD PANIC COASTER, chaque dixième de seconde compte ! Le bouton X quant à lui sert à sauter (eh oui, il y a des trous parfois !) et les trois autres permettent de lancer des espèces de bombes à différentes distances (eh oui, il y a des monstres sur la piste !). En gros ici, le joueur n’a pas le temps de cligner des yeux, mais finit souvent par tourner de l’œil…
Le jeu est constitué de cinq niveaux, chacun divisé en trois courses – la troisième étant à chaque fois un combat contre un boss. On dispose d’une barre d’énergie qui semble généreuse, mais qui fond en réalité à vitesse grand V. On prend souvent des coups, on ne cesse de tomber et très vite, c’est le game over. Heureusement le jeu nous permet de reprendre la partie au début du même circuit via des checkpoints (par exemple au 2-3), mais sans réellement sauvegarder notre progression. Ainsi, si vous éteignez la console après une sauvegarde au niveau 2-3, vous pourrez reprendre votre partie ultérieurement, mais au 2-1. De plus pour sauvegarder votre partie, il faut impérativement réaliser un high score ! Vous vous dites, naïvement, que tout cela doit malgré tout être l’affaire de trois coups de cuillère à pot : le jeu étant tellement rapide que boucler les trois tours d’un circuit pour en voir le bout ne prend qu’un instant. Oui, mais…
MAD PANIC COASTER est en fait très difficile. Plus précisément, le joueur s’y heurtera à deux pics de difficulté qui risquent de le pousser à torturer des nounours Haribo ou à abandonner, c’est selon. Et comme MAD PANIC COASTER n’est pas à une étrangeté près, ces pics de difficulté arrivent très tôt dans la partie. Le premier, c’est lorsque vous lancez le jeu pour la première fois. Je m’en souviens encore : je ne cessais de tomber, de passer par-dessus bord. Tout allait trop vite pour moi, au point de me demander si ce n’était pas mauvais pour mon cœur ! En persévérant, en serrant les fesses et les dents, on finit par trouver nos marques, à comprendre la logique dans ce déferlement chaotique. En gros, il faut connaitre un minimum les circuits, avoir des réflexes et un peu le sens du rythme ! Les trois premiers circuits se bouclent alors sans trop d’encombres. Arrive alors le premier circuit du deuxième niveau (2-1). Je me vois encore sur la ligne de départ, les mains moites et les yeux, hagards. Et j’entends toujours les complaintes des joueurs vaincus revenir me hanter, dans un triste écho. Plus d’un a, dit-on, sombré dans l’alcool et la dépression. Au fond du caniveau.
Contre toute attente, le niveau 2-1 est en effet le plus difficile de tout le jeu, reprenant à son compte l’un des concepts vidéoludiques qui m’a le plus exaspéré/traumatisé durant toute ma vie. Eh oui je vous le donne en mille : l’inertie ! Le circuit en question se déroule sous une fine pluie de flocons, et on devine donc la piste recouverte d’une couche de glace assassine. Dans un jeu où le wagonnet est, de base, très remuant et compliqué à manier, l’ajout d’une inertie supplémentaire relève du concept abscons. La difficulté atteint alors des sommets de nuisance insoupçonnés, le stress est à son paroxysme, notre cœur s’emballe et plus d’une fois j’ai eu peur de finir à l’hôpital – astuce salvatrice : sauter régulièrement permet d’atténuer l’inertie. Mais le pire est encore à venir : même si vous parvenez à passer le niveau 2-1, il vous faudra ensuite terminer le 2-2 et le 2-3, et réaliser un high score pour pouvoir enfin sauvegarder votre progression, éteindre votre console et goûter un repos bien mérité. Au secours – que dis-je : save qui peut ! Petite astuce pour les high scores : évitez d’en réaliser trop tôt dans votre partie, ne dépassez pas les 40.000 points (oui parfois je vous recommande le suicide… le saut dans le vide !). Ainsi, lorsque vous souhaiterez sauvegarder dans les plus hauts niveaux, il vous suffira de sélectionner le premier circuit (1-1), que vous devriez maitriser, puis d’enchainer avec le 1-2, de légèrement dépasser les 40.000 points et donc de pouvoir sauvegarder. Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour simplement jouer à un jeu vidéo… Moi j’appelle ça une high scorie !
Le reste du jeu est heureusement d’un autre calibre : difficile, mais pas (trop) frustrant, avec des circuits intenses mais ni très longs ni trop tortueux (quelques feintes pour récupérer les diamants – points de vie – et pour choper un raccourci dans le 5-2 aussi). Certes on stresse, on jure et on panique. Ici pas de place pour la paresse. Mais si on accepte de jouer à un tel titre, c’est aussi pour en baver, relever un défi (accrochez-vous pour voir les deux fins !). Le jeu va à mille à l’heure, les pièges et monstres sont légion et se renouvellent souvent, et il est nécessaire de prendre des décisions impossibles presque à chaque instant (éviter, détruire ou sauter par-dessus un ennemi ? encaisser volontairement un coup plutôt que de risquer une chute ?) tout en étant constamment obligé de recentrer le wagonnet pour ne pas dérailler (façon de parler). Même les tirs demandent de la concentration (carré pour le tir long, triangle pour le moyen et rond pour le court). Ici un virage hyper serré, des monstres apparaissent dans la courbe, certains nous bombardent de projectiles, il faut slalomer/sauter/prier, là un trou béant, je parviens à l’anticiper les riffs de Ken Yokoyama sont parfois stressants mais donnent aussi des ailes, derrière j’esquive de justesse un tas de pixels récalcitrants, j’ai une roue dans le vide mais redresse le wagonnet dans un réflexe désespéré et j’entame le dernier tour je n’ai même pas le temps de souffler si je cligne des yeux je meurs. Oui, le jeu va à mille à l’heurt.
Développé par une poignée d’inconnus et de techniciens un peu plus confirmés, MAD PANIC COASTER est un jeu improbable comme la PlayStation japonaise aimait nous en proposer assez régulièrement. Sous ses atours de simulateur de montagnes russes, MAD PANIC COASTER est en fait un vrai jeu d’arcade qui n’a rien de réaliste mais qui procure des sensations folles. À la fois simple mais pas évident à prendre en main, MAD PANIC COASTER est un vrai tour de farce… qui ne plaira pas à tout le monde. C’est aussi ce qui fait une partie de son charme salace.
Images : harcoregaming101
Vidéo :