Project-X (Amiga, 1992)

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Année : 1992 (1993 SPECIAL EDITION)
Studio : Team17
Éditeur : Team17
Genre : rixes dans l’espace
Joué et testé sur Amiga 500
Support : disquettes


À bord de l’un des trois vaisseaux qui vous sont proposés (plus ou moins rapide, plus ou moins puissant), vous devrez fendre l’espace et vous faufiler entre les astéroïdes tueurs pour enfin apercevoir la terre ferme de la planète Ryxx. Prenez garde aux canons aliens et à leurs monstrueuses machines, ainsi qu’aux montagnes enneigées de Ryxx… Si vous survivez aux froids semeurs de morts extraterrestres de la surface, vous pourrez vous enfoncer vers le cœur de la planète, fait de volcans et de magma suintant de toutes les parois… Encore plus profond, le lac souterrain mettra vos nerfs à rude épreuve, tant votre pilotage sera affecté par les aléas de l’eau… La base alien vous attendra alors. Préparez-vous pour le duel final !

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Team17, dans l’inconscient collectif et pour la plupart des jeunes joueurs, c’est avant tout synonyme de WORMS – la cultissime licence pleine de poésie. Parce qu’elle fait des vers. Mais pour les vieux de la vieille, Team17 c’est aussi et surtout des jeux Amiga aux graphismes et aux musiques de toute beauté  – parfois à l’intérêt limité (FULL CONTACT, BODY BLOWS) mais aussi souvent particulièrement réussis. Je ne m’étendrai pas sur les titres simplement édités par Team17 mais m’attarderai sur les jeux qu’ils ont développés eux-mêmes comme des grands – malades perfectionnistes du détail qui tue : SUPERFROG, ALIEN BREED 1 et 2 (mes chouchous) ou encore et surtout PROJECT-X. Un jeu qui fit grand bruit en 1992, tant il rivalisait de technicité mais aussi d’audace dans le game design – pour un shoot’em up micro, j’entends. Mais PROJECT-X fit aussi grand bruit en raison… des hurlements de désespoir poussés par les joueurs désabusés ! Celui qui a dit un jour : « dans l’espace, personne ne vous entend crier », il n’avait pas encore dû jouer à PROJECT-X ! Hardcore jusqu’au creux des reins, ce shoot a poussé plus d’un joystick au suicide. Toujours à l’écoute des joueurs (et de leurs portefeuilles ?), Team17 a sorti une nouvelle version de son bébé impitoyable un an plus tard sous le titre SPECIAL EDITION – pour le coup du portefeuille, je suis mauvaise langue : le jeu est ressorti dans une version « budget ».

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Pour faire bref, sachez que le jeu dans son édition originelle était clairement abusé – mal pensé, donc. La difficulté était telle qu’il était extrêmement dur de venir à bout du deuxième niveau. Calqué sur le système cher à GRADIUS, l’armement était plus un crève-cœur qu’autre chose tant il était difficile d’accumuler les power-up : les ennemis hyper résistants y étaient pour quelque chose… En gros dès le début du jeu, des hordes de « petits ennemis » vous assaillent. Dans un shoot’em up bien fichu, vous les tuez, récupérez les power-up et augmentez vos armes/speed/homing missiles à l’envi. Mais pas dans PROJECT-X en 1992. Obtenir des power-up et améliorer une ou deux fois son vaisseau relève déjà de la gageure… à moins d’opter pour le vaisseau le plus puissant – mais il dégage une inertie qui se révélera assassine dans les niveaux suivants, où les décors rivaliseront de beauté et de… mortelles voluptés. Pire, la version de 1992 propose des niveaux plus longs et encore plus tortueux – dès le premier chapitre, c’est à se taper la tête contre les murs. Le mode rookie arrondit un peu les angles, mais il ne vous ouvrira pas les portes des derniers niveaux. Argh.

Face à la grogne ambiante, Team17 a donc réagi et a sorti une nouvelle version en 1993, expurgée de certains passages trop chauds (qui rendaient d’ailleurs les niveaux trop longs, voire éreintants), gonflant légèrement votre arsenal d’entrée de jeu et vous permettant de commencer dans l’un des trois premiers niveaux de votre choix dès votre première partie. Une musique d’ambiance est passée à la trappe durant le processus, mais c’est un sacrifice particulièrement bénin tant les avantages sont nombreux. Tout d’abord on passe de quatre à trois disquettes (toujours ça de gagné quand on ne dispose pas de lecteurs externes), mais surtout le jeu devient enfin jouable – véritablement jouable, j’entends. Certes il est toujours extrêmement dur, mais pas impossible, et encore moins injuste. Même si quelques passages risquent de vous faire perdre votre sang froid – en particulier le deuxième niveau, magnifique en pleine neige, mais aussi particulièrement ardu : certains ennemis y sont tellement résistants qu’il vous faudra anticiper leurs mouvements, les éviter et attendre qu’ils sortent de l’écran… À moins de jouer en mode rookie (vive le mode rookie) mais qui, à l’instar de la version de 1992, ne vous permettra pas de goûter à la substantifique moelle du jeu, à savoir son dernier niveau avec son boss final très… étrange.

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La résistance surréaliste de quelques ennemis n’est pas le seul défaut de PROJECT-X SPECIAL EDITION. Certains de ces vaisseaux tirent de manière sporadique, c’est-à-dire dans n’importe quelle direction, au mépris de la logique – ceux-ci auraient donc des canons invisibles situés partout sur leur carlingue ? À l’avant, à l’arrière, sur les côtés ? Je trouve que ça empêche le joueur d’anticiper les mouvements adverses, de se jouer parfaitement des patterns. Ajoutez à cela la dimension riquiqui des boulettes de base (une toute petite boule rouge), et vous comprendrez que vous avez intérêt à garder l’œil bien ouvert – n’en fermez aucun, même pour cligner des yeux une seconde, tant le moindre mauvais mouvement est susceptible de vous faire entrer en collision avec le décor. C’est particulièrement vrai pour le niveau 2 (l’écran de jeu est plus réduit en raison de la présence du sol, des arbres) et pour les niveaux 3 (le volcan) et 4 – la grotte inondée, un cauchemar, car lorsque votre vaisseau entre dans l’eau, il est happé par une inertie absolument dingue. Pire encore : il en va de même lorsque vous sortez de l’eau…

Maintenant, il faut savoir que ces défauts ne sont pas rédhibitoires. Ils rebuteront des joueurs (beaucoup de joueurs), c’est certain. Mais PROJECT-X peut parfaitement être dompté. Anticiper d’une demi-seconde l’inertie assassine qui va s’emparer de votre vaisseau lorsque vous entrerez/sortirez de l’eau ; ne pas faire de mouvements brusques pour zigzaguer entre les boulettes (la hitbox est hyper précise, ne paniquez pas) ; avoir l’œil sur chaque coin de l’écran (un vaisseau à deux doigts de sortir dudit écran pouvant toujours lâcher une boulette par derrière) ; connaître les patterns des boss bien évidemment, mais aussi de certaines vagues ennemies – c’est particulièrement vrai dans le niveau 4, où il vous faudra parfois anticiper certaines vagues en vous plaçant à un endroit bien précis ; privilégier le jeu au joypad et non pas au joystick souvent doté d’un seul bouton ; ne pas être trop confiant et construire une tactique à base de stealth (invulnérabilité durant de longues secondes) – ça va vous coûter neuf power-up, mais certains niveaux ne sont pas avares en la matière, vous devriez donc pouvoir utiliser le stealth une fois dans chaque monde (à part peut-être le deuxième), voire deux à mesure que vous vous rapprocherez de la fin.

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Si vous parvenez à maîtriser ces éléments, alors PROJECT-X vous ouvrira ses glorieuses portes en grand. Celles d’un shoot’em up de très bonne qualité pour un micro-ordinateur, qui a su s’inspirer d’un illustre aîné pour son système d’armement et de power-up (GRADIUS) tout en disséminant çà et là des petits clins d’œil délicieux à ce genre très japonais – les petits volcans et les phénix de GRADIUS (encore lui) ou bien les stages bonus qui vont à toute vitesse, ressemblant comme deux gouttes d’eau acide à certains passages de l’excellent AERO BLASTERS. Mais parallèlement à cela, PROJECT-X dégage quelque chose de bien personnel. Une espèce d’ambiance techno-futuriste qui, si elle n’a rien de particulièrement originale, est ici à tel point savamment exécutée (jusque dans la voix digitalisée qui s’adresse souvent à vous) qu’elle finit par fasciner. Quant à la patte graphique, elle est magnifique mais aussi très froide. Elle ne plaira pas à tout le monde.

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PROJECT-X est donc un jeu qui demande des efforts pour pouvoir être apprécié à sa juste valeur. Si vous parvenez à vous familiariser avec quelques-unes de ses étrangetés (que certains qualifieront indiscutablement de défauts), si vous adhérez à son atmosphère de métal en apesanteur et si vous acceptez de mourir un nombre incalculable de fois avant de pouvoir enfin maîtriser ses niveaux, alors vous verrez PROJECT-X sous son vrai visage. La face cachée et aseptisée de la Lune se transformera en Soleil incandescent. Que c’est beau, franchement ! Le jeu est absolument magnifique : ici une planète rougeoyante qui tapisse le fond de l’espace, là des montagnes enneigées dessinent une élégante ligne d’horizon… et la foudre, la gigantesque foudre qui vient parfois frapper de son sceau électrique ces merveilleux décors spatiaux. Des décors qui ne sont pas uniquement cosmétiques, puisqu’ils ont une grande importance dans votre progression : il vous faudra parfois les frôler, éviter quelques arbres aux branches trop fièrement dressées vers un ciel constellé d’étoiles, voire comme je l’ai déjà précisé plus haut, aller et venir entre l’air et l’eau dans le quatrième niveau. Détail génial : lorsque vous pénétrez dans l’eau, le son change et donne une merveilleuse impression de profondeur. Du travail d’orfèvre à la Team17 tout craché !

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Du point de vue des ennemis, il faut bien avouer qu’ils n’ont rien de particulièrement mémorables mais certains tirent malgré tout leur épingle du jeu : la sphère folle qui tire dans tous les sens durant le premier niveau, le boss sous-marin qu’il vous faudra occire en marche arrière (!), la pluie de petits missiles dans le tunnel final ou encore ces innombrables vagues ennemies qui se muent en véritable tsunami pour se jeter stupidement sur vous par dizaines et vous submerger en vous écrasant (des « space sheeps« ?).

Alors on pourra toujours pester contre le manque d’originalité des armes et les faibles différences entre les tirs, on pourra également rager à raison à l’encontre du deuxième niveau peu inspiré en matière de level design (certains passages et ennemis reviennent deux fois…), voire s’interroger face aux patterns de difficultés très inégales en matière de vagues ennemies (on peut parfois rester au milieu de l’écran et tout dézinguer)… Oui on pourra toujours faire la fine bouche, mais celle-ci gardera heureusement le sourire puisque PROJECT-X est bel et bien l’un des très bons shoot’em up de la micro 16 bits. Parfois un peu trop dur, manquant certainement de flexibilité, PROJECT-X aura du mal à charmer les joueurs purement consoles. Les fans de micro devraient au contraire être ravis de se replonger dans l’univers froid et impitoyable du bébé technologique de Team17, même s’il leur faudra se retrousser les manches (voire disons-le carrément : se sortir les tripes !) pour espérer voir un jour la fin du jeu sans tricher. Heureusement, et c’est une lumineuse idée, le mode rookie est là pour contenter tout le monde.

Note :      Nostalgie :

Une maniabilité un peu rigide héritée d’une certaine tradition micro, un manque certain de flexibilité dans le gameplay et les options (même s’il y a un mode rookie), des patterns aux pics de difficulté très inégaux… Un joueur qui n’est pas habitué aux micro-ordinateurs 16 bits aura sans doute du mal à apprécier PROJECT-X comme il se doit. Sans doute trop dure, la version remaniée sortie en 1993 demeure néanmoins beaucoup plus abordable que le jeu originel, édité un an avant. L’ayant connu à sa sortie, PROJECT-X est pour moi toujours un très bon jeu, techniquement renversant et qui propose une immersion totale dans son univers techno-futuriste sidérant de beauté. Mais sa rigidité globale fait qu’il a beaucoup moins bien vieilli que des shoot’em up purement consoles datant de la même époque. À noter que le jeu est également disponible sur Amiga CD32, et qu’une suite a vu le jour sur PlayStation.

Images : jeux vidéo et des bas

Le premier niveau, joué par mes soins :

Le deuxième (très dur) :

Le troisième (plus facile) :


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