MARVEL SUPER HEROES – WAR OF THE GEMS
Titre alternatif : Marvel Super Heroes in War of the Gems
Année : 1996
Studio : Capcom
Éditeur : Capcom
Genre : gemme, gemme pas ?
Joué et testé sur Super Famicom
Support : cartouche
Warlock fait appel aux plus grands super-héros de la Terre pour retrouver les Infinity Gems avant Thanos… Ce dernier souhaite en effet se les approprier afin d’en corrompre les pouvoirs, et ainsi soumettre l’univers à sa tyrannie. Hulk, Iron Man, Captain America, Spider-Man et Wolverine vont donc unir leurs forces afin de battre Thanos à son propre jeu : utiliser le pouvoir des gemmes pour renforcer leurs capacités déjà très… spéciales ! Les gemmes en question sont au nombre de cinq : la Time Gem, permettant de bouger deux fois plus vite, la Space Gem qui double la hauteur des sauts, la Reality Gem, avec laquelle il est possible de voir des choses cachées au commun des mortels, la Power Gem qui multiplie par deux la force de frappe, la Soul Gem qui double la quantité des points de vie, et enfin la Mind Gem, permettant d’attaquer à distance par la seule force de l’esprit… Mais comme cette dernière gemme est la propriété de Thanos, quelque chose me dit que les Avengers et autres X-Men ne sont pas près de mettre la main dessus !
Deux ans après MUTANT APOCALYPSE, Capcom remet le couvert en nous sortant WAR OF THE GEMS, un nouveau beat’em all en 2D à la sauce Marvel et avec de très gros sprites. Le clin d’œil aux Versus Fighting chers à l’éditeur japonais est toujours aussi évident, avec ces gros super-héros et super-vilains, les coups à sortir avec des manip’ bien connus des joueurs de STREET FIGHTER 2 et plusieurs personnages jouables disponibles – aux capacités différentes, cela va sans dire (c’est pour ça que je me contente de l’écrire). Hélas et malgré les meilleures intentions du monde (faire un bon jeu, répondre aux attentes des joueurs, exploiter facilement une licence lucrative – rayez les mentions inutiles), eh bien la guerre des gemmes n’a pas accouché d’une pépite…
Pourtant le jeu ne manque pas de qualités : les gros sprites de Hulk, Wolverine, Captain America, Iron Man et Spider-Man sont magnifiques. Mieux, leurs différents coups personnels apportent une vraie variété au gameplay, voire une part de tactique : certains peuvent grimper aux murs pour récupérer des bonus cachés par exemple, quand d’autres frappent très fort (je vous laisse deviner de qui il s’agit), disposent d’un double saut (Iron Man), d’une prise au corps (Hulk), de charges au sol (Cap America, Wolverine, Hulk) ou dans les airs (Iron Man). Spider-Man est le plus rapide (c’est loin d’être anecdotique au corps à corps), Captain America est assez complet (il peut jeter son bouclier ou charger avec tel un bulldozer), Wolverine est plutôt équilibré et frappe assez fort mais c’est bel et bien Iron Man qui est, à mon sens, le plus intéressant – double saut, laser, grenades, charge volante, excellent combo au corps à corps au sol ou dans les airs, etc. Suivant votre manière de jouer, certains personnages seront donc à privilégier dans des niveaux bien précis – mais cela vous l’apprendrez après vous être cassé les dents une première fois dessus.
Mieux : le petit côté tactique de WAR OF THE GEMS se retrouve encore renforcé par la présence des gemmes qui donnent son titre au jeu. Disséminées dans différents niveaux de l’aventure, il vous faudra mettre la main dessus avant les terribles minions de Thanos. Une fois une gemme en votre possession, vous pourrez l’assigner à un héros – en l’associant à un bonus précis, vous doterez votre personnage d’une super attaque (smart bomb pour Iron Man, écrasement avec de la toile pour Spidey, etc.). Un détail importantissime tant certains passages sont difficiles. Mais ces gemmes ont aussi une autre utilité : elles recèlent en elles un pouvoir très particulier. La Time Gem décuplera votre vitesse – vous pensiez que le jeu était lent ?!? Il ira trop vite avec un Spider-Man survitaminé ! La meilleure association possible pour cette gemme étant peut-être Hulk – mais là encore, tout dépendra de votre manière de jouer. La Reality Gem vous permettra de voir des choses invisibles (des bonus), une autre boostera vos sauts, votre puissance ou encore vos points de vie. Vous comprendrez vite qu’il y a de nombreuses façons différentes de boucler l’aventure : avec Hulk équipé de la Time Gem, avec Spider-Man et la Power Gem, ou pourquoi pas avec Iron Man, mobile et complet, enrichi de la Soul Gem doublant les points de vie pour jouer la sécurité.
Dans WAR OF THE GEMS, le joueur a donc le choix des armes, et des âmes – parmi cinq disponibles ! Sachez que lorsque l’un des super-héros meurt, vous devrez reprendre au début du niveau avec un autre personnage. Détail sympa : il est possible de ressusciter un héros tombé au champ d’honneur avec un bonus très particulier – dissimulé dans plusieurs endroits du jeu. Pour garder une trace de tout cela, Capcom a eu l’intelligence de proposer un système de mots de passe élaboré. En gros, après chaque niveau (à deux exceptions près, attention !), vous pourrez récupérer un mot de passe dans la salle d’entraînement – et celui-ci « sauvegarde » toute votre progression – héros tombés ou non, nombre et type de bonus présents dans votre inventaire et énergie de vos personnages – yep, celle-ci ne remonte pas après avoir bouclé un niveau ! À vous d’utiliser les bonus de points de vie avec parcimonie… Oui, ça vaut peut-être le coup de prendre son temps dans certains niveaux non chronométrés pour dénicher ces précieux sésames.
Vous l’aurez compris : WAR OF THE GEMS n’est pas un beat’em all dans lequel on peut se jeter tête la première sans risquer d’en ressortir avec des bosses… Il faut tout d’abord s’approprier les différents coups du jeu, apprendre à jouer avec un peu tous les personnages et bien cibler leurs forces et faiblesses, bien gérer les bonus et bien évidemment sélectionner le niveau à venir à dessein – vous avez en effet le choix. Commencer le jeu directement par le premier niveau proposé dans un aquarium – sous l’eau en temps limité, le jeu est encore plus lent, le boss de fin est une plaie. Oui, l’environnement sous-marin meurtrier risque de vous dégoûter – surtout que vous ne devriez pas maîtriser le gameplay à ce moment précis, et que sans gemme dans votre escarcelle vous ne pourrez pas utiliser de super attaque. Alors au lieu de cliquer bêtement sur le premier niveau proposé, pourquoi ne pas naviguer sur la carte pour vous lancer dans la jungle amazonienne (son boss de fin est une vaste blague) ou dans les montagnes glissantes en Alaska ? Vous aurez tout loisir de revenir plus tard à l’aquarium géant de Boston, avec au moins une gemme en stock et quelques super attaques disponibles. Les mouvements ralentis sous l’eau passent en effet beaucoup mieux quand on utilise la Time Gem !
WAR OF THE GEMS est donc un beat’em all qui demande un peu de matière grise – je n’irais pas jusqu’à dire qu’il faut être un adepte de gemnastique mentale. Le petit côté tactique du jeu est en effet loin d’être très poussé, mais il a le mérite d’exister, d’apporter une évidente variété au gameplay et il permet de relativiser la lenteur de l’ensemble – si vous y êtes vraiment allergique, quid d’une petite Time Gem pour la route ? Par contre, aucune gemme au monde ne pourra s’enorgueillir de pouvoir magnifier le level design très « plan-plan » du jeu, ou le chara-design des différents ennemis qui varie du passable à l’effroyable. Concernant le level design, c’est bien simple : peu ou pas de surprises à l’horizon, quelques phases de plates-formes simplistes et quelques secrets, c’est vrai, mais distribués à doses homéopathiques. Pire : lorsque le jeu cherche à faire preuve d’originalité (le niveau sous l’eau, la phase en « surf » à la Silver Surfer), le résultat n’est pas vraiment satisfaisant. Le chara-design enfin, frise parfois la paresse de compétition : si les cinq héros principaux sont magnifiques, et si quelques boss valent le détour (Thanos, Magus, Fatalis), l’ensemble des adversaires avec lesquels vous croiserez le fer sont d’une tristesse artistique rare. On passera rapidement sur les quelques membres clonés de la Division Alpha (Puck, Sasquatch) pour verser toutes les larmes de notre petit corps musclé face au triste spectacle offert par tous les clones paresseux et mal animés codés par les développeurs de Capcom : il nous faudra ainsi combattre des Evil Iron Man, Evil Wolverine, Evil Hulk… et quand il conviendra de se frotter à des ennemis plus originaux, ce sera pour pester face à leur piètre chara-design. Les fans de Marvel pourraient malgré tout s’amuser des petits clins d’œil à Warlock, à la Chose ou encore au Silver Surfer et au Docteur Strange. On se console comme on peut !
Loin d’être un mauvais jeu, WAR OF THE GEMS se retrouve malgré tout miné par quelques défauts qui pourraient se révéler rédhibitoires pour le commun des mortels joueurs – les niveaux courts, c’est bien. Un level design ingénieux, c’est mieux. Des héros variés, c’est une super idée. Des ennemis clonés ad nauseam, ça fait tache. Des héros aux graphismes léchés, ça fait plaisir. On aurait aimé que les décors bénéficient du même traitement. Enfin la variété apportée aux différents personnages du jeu c’est beau, c’est frais. C’est amusant. Mais pour en profiter pleinement il aurait fallu expurger ce beat’em all de certains défauts inhérents aux mauvais titres du genre, au premier rang desquels on retrouve ce problème frustrant des ennemis qui disparaissent hors écran et qui peuvent malgré tout encore nous frapper – rien de grave, me direz-vous. Yep. Sauf quand il s’agit du Docteur Fatalis qui peut nous shooter à distance… et il ne s’en privera pas le scélérat ! Pour rester beau joueur, on dira qu’il s’agit là de l’une des manifestations de ses super pouvoirs, ah, ah, ah !
Sympa mais loin d’être inoubliable, WAR OF THE GEMS fera sans nul doute passer un bon moment aux fans des super héros Marvel. Le petit côté tactique des gemmes, les coups différents pour chacun des cinq personnages jouables (même si on se retrouve à faire et refaire toujours les mêmes au final) et l’ingénieux système de mots de passe tirent en effet ce beat’em all relativement moyen vers le haut. On pourra malgré tout pester sur l’absence de grosses nouveautés par rapport à MUTANT APOCALYPSE, sorti deux ans plus tôt, et dont WAR OF THE GEMS reprend à la fois les bonnes idées… et les glorieux défauts.
Note : Nostalgie :
Lorsqu’il est sorti en 1996, WAR OF THE GEMS était déjà presque anachronique. Les joueurs à la pointe de l’actualité usaient déjà leurs pouces sur les pads Saturn ou PlayStation, quand les retardataires continuaient l’aventure sur la Super Nintendo – mais avec des titres très poussés, comme DONKEY KONG COUNTRY 3. Le jeu de Capcom arrive donc avec pas mal de retard… autant sur la forme que sur le fond. Zapper entre les cinq différents personnages du jeu demeure malgré tout très plaisant, surtout quand on sait qu’il est possible de leur assigner des gemmes. Les amateurs de gros sprites et les fans de Marvel devraient donc y trouver leur compte, l’espace de quelques parties.
Images : bitcultures et gamefaqs