THE COMPLEX
Année : 2020
Studio : Wales Interactive / Little Jade Productions / Good Gate Media
Éditeur : Wales Interactive / Limited Run Games
Genre : raté de laboratoire
Joué et testé sur PlayStation 4
Support : Blu-ray
Alors qu’elle pensait que son projet de nanocells sauverait des vies, Amy Tennant, brillante épidémiologiste travaillant pour la compagnie Kensington, est mise au pied du mur : une femme a été retrouvée dans le métro londonien, crachant du sang et prise de violentes convulsions… avec les fameuses nanocells, pourtant encore à l’état de projet, circulant dans ses veines ! L’intéressée a rapidement été placée à l’isolement, dans les locaux ultra protégés de Kensington. Un laboratoire surnommé « le complexe ». Amy Tennant est immédiatement envoyée sur place.
THE COMPLEX est un film interactif qui, bien évidemment, n’a pas disposé d’un budget hollywoodien. Aussi pour camoufler le manque de moyens, les producteurs ont eu recours à un subterfuge bien connu de certains cinéastes : le huis clos ! Chiche ? On ne leur en voudra pas, tant il semble difficile de trouver les fonds nécessaires pour boucler un film interactif qui, malgré un léger regain de popularité ces dernières années (dématérialisation, Steam, etc.), demeure coincé sur le marché austère des jeux vidéo de niche.
En gardant ces données en tête, on ne peut qu’être satisfait du rendu final de THE COMPLEX. Certes, un certain nombre de scènes fait très fauché (les rares moments en extérieur, l’action, les dénouements, etc.), mais l’ensemble se révèle plutôt correct pour le genre – mieux : l’interprétation est relativement bonne, en particulier les rôles principaux. L’alchimie qui se dégage de la relation empoisonnée entre Amy (Michelle Mylett) et Rees (Al Weever) est pour beaucoup dans le plaisir que l’on prend à suivre l’intrigue de THE COMPLEX – une intrigue loin d’être inoubliable, on ne va pas se mentir. On est loin du remarquable CONTAGION de Soderbergh mais, encore une fois, ne comparons pas ce qui n’est pas comparable. Quant à celles et ceux qui, comme un virus sourd et insidieux, s’amusent à critiquer les techniciens derrière THE COMPLEX en les accusant de « surfer sur le Covid-19 », je leur demanderai simplement de jeter un œil à la date de sortie du jeu : mars 2020. Ce qui sous-entend que le projet a été lancé bien avant cela…
Concernant les choix à faire (en temps limité ou non, vous décidez de cela dans les options), ceux-ci ont évidemment une importance réelle – neuf fins différentes ont ainsi été prévues. Malgré tout, on pourra regretter que ces choix, cruciaux, soient pour la grande majorité essentiellement situés dans la toute dernière partie du jeu. Un artifice plutôt répandu dans ce genre de productions mais qui dégonfle considérablement l’importance des décisions prises en amont. Certes, on a toujours l’illusion d’avoir le choix, de changer les choses… et c’est le plus important lorsque l’on joue à un tel jeu la première fois. Mais lorsque l’on y rejoue, ladite illusion se dissipe, la fiction se délite : on est désagréablement surpris par l’absence de réelles conséquences à la suite de choix que l’on croyait pourtant cornéliens. En gros, dans THE COMPLEX, les décisions prises pendant près des deux premiers tiers du récit iront toujours dans le sens voulu par la scénariste. Tel personnage finira toujours infecté quoi que vous fassiez, c’est toujours la même personne qui ouvrira une caisse dangereuse quand bien même vous auriez demandé à quelqu’un d’autre de le faire, etc. Il y aura toujours un truchement d’écriture pour que le scénario retombe lâchement sur ses pattes.
Heureusement, THE COMPLEX propose malgré tout une petite feinte : le jeu tient à jour des statistiques et note la qualité de nos relations avec tous les personnages, ce qui aura pour conséquence de nous donner accès, ou pas, à certaines petites scènes à des moments bien précis, plus tard dans le récit. Si vous êtes un peu en froid avec tel individu par exemple, vous n’aurez pas la possibilité de lui demander de l’aide lorsque vous en aurez besoin. Sympa mais, encore une fois, rien qui ne vienne vraiment chambouler le bon déroulement du scénario : ce n’est vraiment que dans le dernier tiers, que le joueur pourra profondément l’altérer.
Malgré des enjeux qui tombent quelque peu à plat vers la fin (manque d’emphase dans la mise en scène et les dialogues ?), THE COMPLEX demeure un petit thriller interactif très correctement emballé pour le genre, sur fond d’infection incontrôlée dans un laboratoire aux secrets bien plus lourds qu’escomptés. Si LATE SHIFT demeure, à mon sens, la référence moderne du genre, THE COMPLEX est un jeu à faire – les amateurs ne seront pas déçus. Comptez environ une heure et trente minutes pour en venir à bout la première fois, et beaucoup moins par la suite : le jeu vous permet en effet de zapper les séquences que vous avez déjà vues.
Attention : THE COMPLEX n’est pas le récit d’une pandémie incontrôlable dans les rues de Londres. L’essentiel de l’action se déroule en effet à huis clos, dans un laboratoire ultra secret enfoui sous les locaux d’une prestigieuse compagnie pharmaceutique. Cette unité de lieu est compréhensible d’un point de vue budgétaire, mais un brin décevante quand on compare THE COMPLEX au meilleur jeu du genre selon moi, à savoir LATE SHIFT. L’aventure se révèle malgré tout extrêmement plaisante et efficace, en partie grâce aux acteurs principaux et à certains choix cornéliens situés principalement dans la dernière partie du jeu. Si vous avez du mal avec l’anglais, sachez que des sous-titres français sont disponibles.
Images : éditeur
Trailer :