Monkey Island: Special Edition Collection (PlayStation 3, 2011)

MONKEY ISLAND: SPECIAL EDITION COLLECTION
Titre alternatif : Monkey Island: Edition Spéciale Collection
Année : 2011
Studio : LucasArts
Éditeur : LucasArts
Genre : on en reste groggy
Joué et testé sur PlayStation 3
Support : Blu-ray


Le naïf mais téméraire Guybrush Threepwood souhaite devenir un pirate. Un vrai de vrai. Qui boit du grog, jure, lit des blogs bizarres sur les jeux vidéo et crache par terre. Mais pour cela il va tout d’abord devoir relever plusieurs défis afin de faire ses preuves devant le conseil des pirates de l’île de Mêlée. Difficile ? Improbable ? Que dire alors de ce qui va suivre : une aventure extraordinaire, au-delà des océans connus, sur la mystérieuse île aux singes afin de botter les fesses du redoutable pirate fantôme LeChuck.

Quelque temps après avoir vaincu LeChuck, le pétillant pirate de pacotille Guybrush Threepwood se retrouve bloqué sur l’île de Scabb, soumise à un embargo de Largo LaGrande, qui y fait régner la terreur et en profite également pour détrousser tous les habitants des lieux – un cimetière d’épaves réaménagé en ville flottante ! Mais il en faut plus pour décourager Guybrush qui, avec l’aide de Lady Vaudou, va bien évidemment trouver un moyen pour lever l’embargo et quitter l’île en question… Mais le teigneux Largo LaGrande a la rancune d’autant plus tenace qu’il fut, autrefois, le bras droit d’un certain LeChuck…

Ron Gilbert est un grand inconnu pour les jeunes, et une légende vivante pour les quadragénaires. L’inventeur du jeu d’aventure moderne, ou point&click, a donné un grand coup de fouet aux jeux vidéo, et de vieux aux productions Sierra de l’époque. Mieux, l’intéressé a inventé un moteur révolutionnaire (SCUMM), fut peut-être le premier à mettre en scène un anti-héros dans un jeu vidéo et à démocratiser le terme cinématique, alors peu en vue jusque-là. Ron Gilbert décida aussi de tourner le dos aux game over qui, selon lui, avaient été hérités des jeux d’arcade mais n’avaient rien à faire dans un jeu d’aventure. Cerise sur le gâteau : le bonhomme s’est aussi payé le béta-testeur le plus cool de la planète, avant de commercialiser INDIANA JONES AND THE LAST CRUSADE : Steven Spielberg en personne ! Fan de jeux vidéo, celui-ci traînait souvent ses guêtres dans les locaux de LucasArts, dans les années 80.

De l’eau a coulé sous les ponts, en même temps que des flots d’argent sous les pontes… de Disney, qui a racheté de nombreuses compagnies dont… Lucasfilm. Pour le plus grand malheur des fans de STAR WARS, mais aussi de la franchise MONKEY ISLAND, qui semble désormais morte et enterrée – aurait-elle pu faire de l’ombre à la série PIRATES OF THE CARIBBEAN ? Mais avant d’être racheté/piétiné/violé/humilié par Disney, LucasArts a pris le temps de ressortir les premiers épisodes de MONKEY ISLAND – sous des atours plus modernes : graphismes, gameplay et sons ont été retouchés. Autant le dire de suite : je n’aime pas trop ce nouvel habillage. Ça manque d’âme, de sel, d’amour. De grog. Les visages en particulier, notamment celui du personnage principal dans le premier jeu (ça s’arrangera un peu avec la suite), me semblent même ratés et en complète inadéquation avec le premier, le seul, le pixelisé, le vrai Guybrush Threepwood tant aimé. Mais passons. Ce défaut est finalement assez accessoire puisqu’il est possible de basculer en mode rétro d’une simple pression sur le bouton Select (sur PlayStation 3). On retrouve alors nos pixels d’origine contrôlée, toujours aussi sublimes, profonds et expressifs. Concernant la Special Edition et ses ajouts, notons malgré tout des doublages anglais de grande qualité, qui ajoutent indéniablement quelque chose à l’ambiance déjà extraordinaire de ce jeu inoubliable – qui était muet, à l’époque de sa sortie (pour moi ce fut en 1990, sur Amiga). Le gameplay enfin, n’est pas exempt de tout reproche, tant le souvenir de la souris originelle de nos micro-ordinateurs personnels revient plus d’une fois nous hanter. Mais encore une fois, en mode rétro, on retrouve rapidement nos automatismes et si c’est un brin moins réactif que sur un vieil Amiga ou Atari ST, ça n’en demeure pas moins extrêmement jouable et, c’est à noter, plus pratique que sur iPhone avec son tactile mal exploité pour l’occasion. Concernant la maniabilité, il faut quand même préciser que LECHUCK’S REVENGE améliore indéniablement les choses, et ajoute même, en plus du bouton d’indice déjà implanté dans le premier MONKEY ISLAND, une option permettant de mettre en surbrillance les objets avec lesquels il est possible d’interagir. Sympa. Mais dispensable si, comme moi, vous êtes un vieux routier élevé à la disquette 3 pouces et demi qui a opté depuis longtemps pour le mode rétro et ses pixels plus profonds que n’importe lequel de ces nouveaux jeux d’aventure en flash.

On retrouve donc, dans cette Special Edition Collection (dispo en physique sur PS3 et Xbox360), les deux premiers titres de la franchise. Oubliez les jeux qui suivirent – et les fans qui sévirent, tant le scénario est sujet à polémique. Pour moi, les choses sont claires : la série MONKEY ISLAND ne compte que deux jeux – les deux premiers. Les autres ne constituant, à mon sens, qu’une simple variation sur un thème annoncé. Certes, la fin (absolument géniale) de LECHUCK’S REVENGE peut être interprétée de deux manières différentes – dont une plus évidente que l’autre. Il faut d’ailleurs noter que, pour repartir sur un troisième épisode, les nouveaux (et talentueux) développeurs ont essayé de tenir plus ou moins compte du choix artistique et scénaristique de Ron Gilbert… qui avait depuis quitté le navire – fantôme ? Je dis bien « essayé » puisqu’il me semble qu’ils n’ont jamais définitivement tranché… Bref, vous l’aurez compris : pour moi les seuls, les vrais MONKEY ISLAND, ce sont les deux premiers.

Inspiré par le roman ON STRANGER TIDES et par l’attraction Pirates des Caraïbes, THE SECRET OF MONKEY ISLAND est, pour moi, le meilleur titre de Ron Gilbert, et tout simplement mon soft préféré – celui auquel je choisirais de rejouer quelques heures avant de rendre l’âme. Et à l’instar de quelques-uns des personnages du jeu, je reviendrai même d’entre les morts pour terminer l’aventure ! THE SECRET OF MONKEY ISLAND est un jeu absolument sublime. Drôle, prenant, excitant, il propose un voyage absolument extraordinaire qui mettra à contribution votre imaginaire. Je n’ai jamais eu autant l’impression de faire partie d’un jeu vidéo, d’une aventure, d’un monde aussi vivant que lorsque j’ai découvert pour la première fois THE SECRET OF MONKEY ISLAND.

Mais j’ai déjà parlé de THE SECRET OF MONKEY ISLAND en long, en large et en travers de la gorge d’un pirate patibulaire lors de mes petits tests des versions Amiga et iPhone. Je me contenterai donc ici d’en rappeler le dernier point fort : son accessibilité. Contrairement à d’autres jeux d’aventure de la même époque – voire même plus proches de nous, THE SECRET OF MONKEY ISLAND n’est pas si difficile. Un brin tortueux parfois, mais rien d’insurmontable pour un joueur aguerri. Tout le contraire de sa suite, aka LECHUCK’S REVENGE. Un excellent jeu au demeurant, mais que je place malgré tout derrière son aîné. La faute à sa difficulté rehaussée – beaucoup plus d’objets disponibles (et donc de combinaisons possibles), un terrain de jeu plus vaste, quelques coups vraiment fumeux… le joueur a alors l’impression de tomber de Caraïbe en Scylla. Pour vous dire la vérité, je n’ai jamais réussi à le terminer sans soluce. Ses quelques coups de génie, pourtant très drôles, peinent aussi à rivaliser avec les meilleurs moments du premier jeu – le concours de crachats est nettement moins fun que les duels d’insultes, par exemple. D’ailleurs je n’ai jamais digéré ce concours de crachats (façon de parler !). La manière dont il nous est présenté laisse à penser qu’il est possible de réaliser un jet pharamineux grâce à une combinaison particulière, alors qu’en fait il n’en est rien. Il faut juste posséder certains objets – entre autres choses… Ceci n’est qu’un exemple, mais j’ai toujours trouvé que LECHUCK’S REVENGE tapait trop haut. Trop fort. Au point d’abandonner le joueur meurtri raide mort… Si j’aime malgré tout beaucoup ce jeu, je dois quand même avouer qu’il m’a causé quelques réveils douloureux, à l’époque, en raison de ces intempestifs changements de disquettes (onze au total !) et de ces trop nombreuses heures passées à me triturer les méninges… Et la gueule de bois au grog, je vous assure que ça laisse des traces !

Quoi qu’il en soit, cette compilation de deux titres majeurs des années 90 (dont, à mon sens, au moins un jeu culte) est une bénédiction. Et le club des vieux grincheux de compétition que je préside à mes heures perdues n’aura ici que peu de grains de folie à moudre : si vous n’aimez pas les graphismes remaniés (et le regard bovin du nouveau Guybrush), rien ne vous empêche de basculer en mode rétro pour bénéficier des jeux dans leur version d’origine. Certes, avec cette interface il est impossible d’écouter les nouveaux et somptueux dialogues, mais après tout qu’importe : tout d’abord il est toujours possible de jouer au MacGyver de l’impossible (utiliser le mode rétro, basculer en mode Special Edition lors des phases de dialogues, et rebasculer en rétro ensuite). Ensuite, il faut aussi garder à l’esprit que les jeux de l’époque étaient déjà muets… Muets mais tellement bavards ! Un paradoxe de plus, à ranger aux côtés des autres mystères de l’île aux singes… à trois têtes ?!?

Note :

Je ne reviendrai pas sur les qualités intrinsèques des deux jeux d’exception présents dans cette compilation, et qui ont particulièrement bien vieilli – surtout le premier. Je m’attarderai seulement sur les ajouts des Special Edition. La refonte graphique pourra faire grincer des dents, mais elle plaira sans nul doute à celles et ceux qui n’ont jamais connu les pixels des années 90 – surtout, il est toujours possible de basculer en mode rétro. Enfin, le second jeu améliore certains ratés du premier remake : graphismes (notamment quelques visages) et gameplay – mieux pensé pour être joué au pad dans LECHUCK’S REVENGE. Ajoutez à cela quelques bonus en sus, et vous obtenez une compilation immanquable, et en boîte s’il vous plaît, sur PlayStation 3 et Xbox360 ! Ça donnerait presque envie de trinquer au grog, tout ça !

Images : jeuxvideo.com

Test d’époque du magazine Génération 4, du deuxième épisode :

Gamesmater (1992, version PC) :

Laisser un commentaire